Le scénario catastrophe pour l'assurance-vie

L'économie mondiale bénéficie actuellement d'un environnement de taux d'intérêt historiquement bas. Mais le déluge de liquidités déversées sur les marchés pour éteindre l'incendie de la crise du crédit fait craindre une brusque résurgence de l'inflation. Les banques centrales seraient alors contraintes de relever vigoureusement leurs taux d'intérêt directeurs, ce qui ferait plonger le prix des obligations qui évolue en sens inverse des taux. Ce scénario du « krach obligataire » constitue la principale menace pour la stabilité de l'assurance-vie. Et plus précisément pour les contrats dits « en euros », qui représentent l'essentiel de l'encours du placement préféré des Français (86 % à fin 2008). Les fonds en euros sont en effet largement investis en obligations à taux fixe, et notamment en emprunts d'État. Risque de rachats massifsSi les taux montent de façon marquée, le rendement des contrats en euros existants perd en compétitivité par rapport aux placements dont le rendement varie avec l'inflation, comme cela a brièvement été le cas fin 2008. Le livret A, dont le taux est passé à 4 %, avait alors vu sa collecte exploser, largement aux dépens del'assurance-vie.Si une telle situation perdure, le risque est alors de voir les épargnants racheter massivement leurs contrats, c'est-à-dire récupérer leur épargne, pour la placer sur d'autres supports plus rémunérateurs. Mais le livret A, dont l'encours est plafonné à 15.300 euros, ne serait pas en mesure d'absorber un tel flux de capitaux. Course aux parts de marché« Le danger pourrait venir de nouveaux entrants, qui pourraient se lancer dans une course aux parts de marché en offrant des rendements nettement supérieurs à ceux des fonds existants », imagine Adrien Lafaille, actuaire manager et expert retraite chez Optimind. Or, dans un scénario de krach obligataire, les plus-values latentes accumulées par les assureurs sur les titres en portefeuilles fondent comme neige au soleil, faisant bientôt place à des moins-values latentes. Les assureurs deviennent alors vulnérables aux rachats de contrats, qui les forcent à céder une partie des actifs du fonds, donc à réaliser des moins-values importantes, ce qui affecte directement leur solvabilité. Une situation qui contraindrait sans doute l'État à intervenir, comme il l'a fait fin 2008 pour stabiliser le système bancaire.Forces de rappelToutefois, pour Adrien Lafaille, « il s'agit là d'un risque largement théorique, car dans la pratique, il existe de nombreuses forces de rappel. Les assureurs ont en effet la possibilité de doper les rendements offerts pour éviter les rachats, en utilisant leur provision pour participation aux bénéfices. Et la réserve de capitalisation leur permet d'absorber les pertes liées à des rachats en période de remontée des taux, dans la limite des sommes qui y ont été stockées lors du cycle de baisse des taux précédent ». Mais le principal facteur de stabilisation tient à la « viscosité » de l'assurance-vie. « Si la collecte est sensible aux écarts de rendement, l'encours présente une forte inertie, car ce placement est le plus souvent détenu dans une optique de long terme, voire de transmission », explique Adrien Lafaille. Surtout, la perte de l'antériorité fiscale est un facteur dissuasif pour les assurés souhaitant transférer leur épargne pour bénéficier de rentabilités plus attractives.
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