Bercy présente des mesures fiscales dites "de gauche"

Jérôme Cahuzac présentera mercredi le traditionnel collectif budgétaire de fin d\'année -loi de finances rectificative- assorti de mesures contre l\'évasion fiscale. Après le coup de barre à droite du plan compétitivité -vu comme tel, en tous cas, par la majorité des parlementaires de gauche-, le ministre délégué au Budget a l\'intention de « vendre » l\'ensemble ces dispositions, de portée plus ou moins forte, comme autant de mesures marquées à gauche. Il a commencé à le faire dans une interview à Libération : « pas question que certains puissent continuer à se soustraire à cet effort de solidarité nationale par la fraude ou des manœuvres abusives » affirme-t-il. Message à faire passer : grâce à l\'action de ce gouvernement, les riches vont cesser de pratiquer l\'un de leurs sports favoris, l\'évasion fiscale. Un retour en filigrane aux thématiques de la campagne, avant le tournant du 6 novembre, jour de l\'annonce du plan compétitivité.Une \"exit tax\" pour les entreprisesDe quoi s\'agit-il? D\'abord, Bercy prend une mesure que certains avocats fiscalistes jugent structurante : le projet de loi de finances rectificative contiendra la mise en place d\'une « exit tax » pour les entreprises. Concrètement, des entreprises qui voudraient délocaliser certains actifs ou leur siège social seront contraintes de s\'acquitter de la plus-value latente, comme c\'est le cas pour les particuliers désireux de quitter la France et d\'adopter le statut de non résident fiscal.La plus value en question est malgré tout modérée, puisque seule une quote part de 10% est prise en compte. Autrement dit, l\'impôt sera de 3,4%. Une taxation modérée, mais plus élevée que dans beaucoup de pays européens. Cela peut faire réfléchir.Les sommes d\'origine douteuse taxées à 60%Ensuite, le ministère des Finances va ensuite prendre une série de mesures concernant les particuliers. Ainsi, un particulier refusant de dévoiler l\'origine de sommes placées à l\'étranger verra celles-ci taxées à hauteur de 60%. Jusqu\'ici, le risque était faible : s\'agissant, très souvent, de placements en Suisse, les riches ayant fait transiter de l\'argent liquide dans les banques de la confédération helvétique étaient assurés d\'une discrétion sans faille, de la part de celles-ci. Peu de chances que le fisc français soit au courant. Mais les choses changent. « Les échanges d\'information s\'accélèrent, y compris venant de Suisse » souligne un avocat fiscaliste. Il se peut que l\'administration fiscale française ait accès à des informations précises, et en grand nombre. Dans le même ordre d\'idée, un fichier des contrats d\'assurance-vie serait instauré, afin que le fisc ait, là aussi, accès à un maximum d\'informations. Par ailleurs, la loi renforcera en outre « l\'obligation de justifier les encaissements sur ses comptes », à partir d\'un montant de 200.000 euros par an.Une recette globale estimée à un milliard d\'eurosEnfin, d\'autres mesures annoncées ne sont, en revanche, que la transcription dans la législation fiscale d\'une jurisprudence relativement solide, qui permettait déjà au fisc de condamner certains montages. Ainsi, le système donation-cession, par lequel il est possible de donner (à un enfant, par exemple) un bien recélant une plus-value importante, pour échapper à celle-ci, sera sanctionné. De même pour le mécanisme de l\'apport cession, par lequel un entrepreneur apporte à une filiale qu\'il possède des titres recelant une plus-value, sera prohibé . L\'administration pourra par ailleurs avoir accès à la comptabilité sous forme informatique.Au total, ces mesures rapporteront un milliard d\'euros, affirme le ministre du Budget. Les fiscalistes demandent à voire la justification d\'une telle somme. S\'agissant de fraude et d\'évasion fiscale, les évaluations sont par nature incertaines...Pas de lutte contre l\'utilisation des paradis fiscaux par les entreprisesLe message politique du gouvernement serait encore plus net et clair si ces dispositions étaient accompagnées de mesures de lutte contre l\'utilisation des paradis fiscaux, notamment par les entreprises. Une commission d\'enquête sénatoriale a rendu public un rapport très fouillé sur le sujet, fin juillet. Elle proposait une soixante de mesures, dont l\'obligation pour les entreprises internationales de publier une comptabilité par pays, avec l\'impôt payé. « Il faudrait que les entreprises ne puissent plus simplement prétendre qu\'elles gagnent beaucoup d\'argent à l\'étranger et qu\'elles en perdent en France », soulignait le rapporteur de cette commission, Eric Boquet.
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