La monnaie unique patine face au dollar

La petite phrase prononcée par Ben Bernanke le dimanche 5 décembre n'aura pas eu, loin s'en faut, les mêmes répercussions sur le dollar qu'une déclaration analogue faite le 27 août du fin fond du Wyoming, lors du symposium de Jackson Hole. Le patron de la Réserve fédérale américaine avait alors ouvert la porte à une nouvelle phase d'assouplissement monétaire quantitatif, baptisée d'emblée QE2, mise en place à l'issue de la réunion de la Fed du 3 novembre. Début décembre, le même Bernanke avait laissé entendre que le programme de 600 milliards de dollars d'achats de titres de la dette publique des Etats-Unis supplémentaires d'ici à fin juin pourrait être renforcé. Lors de sa première intervention, Bernanke avait déclenché une fulgurante baisse du dollar qui ne s'était interrompue que lors du passage à l'acte de la Fed. Cette fois, non seulement le dollar n'a pas baissé, mais il en a même profité pour rebondir face à l'euro. Vendredi, l'avant-dernière séance avant la réunion du dernier conseil de la Fed de 2010, le billet vert a crevé le seuil de 1,32 pour un euro et cible 1,28, après l'annonce d'une nouvelle décrue, à 38,7 milliards de dollars du déficit commercial américain en octobre, grâce à un bond de 3,2 % des exportations. Alors que l'Europe s'englue dans la crise de la dette souveraine, incapable de parler d'une seule voix, tant sur une augmentation du fonds de stabilité financière que sur la création d'Eurobonds, les États-Unis vont profiter d'une politique plus expansionniste, au travers du prolongement des réductions d'impôts et des allocations chômage. Une dynamique nouvelle va être insufflée à l'économie de l'Oncle Sam, qui rend improbable le recours à un renforcement du QE2. D'autant qu'il montre ses limites : le nouveau « policy mix » américain a provoqué une tension sur les rendements longs que la Fed cherchait à maintenir au plus bas. Ce qui constitue un autre atout pour le dollar, dont les rendements à long terme (3,25 % pour les taux à 10 ans vendredi contre 2,90 % huit jours auparavant) sont devenus plus attractifs que ceux offerts sur l'euro (2,95 % pour le bund allemand de référence).Rechute pronostiquéeÀ l'heure où les modèles de prévisions tournent à plein régime, le mot d'ordre pour 2011 est déjà : vendez l'euro. C'est le cas de Morgan Stanley qui mise sur une économie américaine plus performante que celle de la zone euro et prévoit une rechute de la monnaie unique à 1,18 dollar. C'est aussi le diagnostic de Barclays Capital, qui estime que l'euro a encore un potentiel de repli, bien que dans la seconde partie du millésime les politiques budgétaire et monétaire américaines commenceront à peser sur le dollar, surtout si l'Europe trouve une porte de sortie honorable à ses actuelles turbulences.
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