La démonstration faite en Grèce n'est pas celle espérée...

Le énième sauvetage de la Grèce est encore suspendu au résultat de l\'opération de rachat de sa dette et de la décision du FMI qui en dépend. Un répit en est espéré, mais de quelle durée?Les enseignements de ces sauvetages et de leurs ratés successifs dépassent le cas grec et induisent un profond doute quant à la poursuite de la stratégie européenne actuelle de désendettement. Doute déjà exprimé par le FMI et l\'OCDE. À moins de mettre encore plus radicalement en cause cette stratégie. Moins spectaculaire, la situation de l\'Irlande ou du Portugal aboutit à une lente dégradation de même nature. Dans le cas de l\'Espagne, les mesures prises pour retarder la demande d\'un « plan de sauvetage » produisent déjà des effets identiques.Stratégie défaillante, politique du déni : effet boomerang assuré...Partout, les coupes budgétaires entraînent une diminution du PIB plus forte que prévue et des « multiplicateurs budgétaires » (le ratio qui mesure ce rapport) plus élevés qu\'estimé. Cet enchaînement irrésistible implique de dégager des excédents budgétaires primaires inatteignables, faisant obstacle à la réalisation des objectifs de désendettement. Mariano Rajoy, le chef du gouvernement espagnol, vient de reconnaître qu\'il sera « très difficile » de respecter l\'objectif pourtant déjà assoupli de réduction du déficit. De son côté, George Osborne, le chancelier de l\'Échiquier, a affirmé que « réduire la dette britannique et nous remettre de la crise financière va prendre manifestement plus de temps que ce que nous avions espéré ».L\'évidence de cette impossibilité est cependant toujours niée au profit de colmatages au caractère dilatoire, amenant à s\'interroger sur leurs effets en prenant la Grèce en exemple : per-mettent-ils de gagner du temps ou aboutissent-ils à en perdre? Ne fallait-il pas procéder dès le début à une franche restructuration de la dette, au lieu de s\'y résoudre petit à petit (en attendant de continuer), car le coût global de l\'opération aurait été bien inférieur, comme vient de l\'analyser Natixis*?À quels résultats les dirigeants européens sont-ils en réalité parvenus? Au transfert dans leurs propres livres de comptes, via notamment la BCE, de la dette des pays emportés par la tempête qui figurait auparavant dans ceux des banques privées! Creusant ainsi le piège devant lequel ils se trouvent, péniblement contourné par une restructuration qui n\'avoue pas son nom. Précisément ce que Moody\'s a sanctionné en dégradant la note du FESF et du MES, en raison de la fragilité accrue de leur montage financier, qui se précise.Quoi qu\'il en soit, le Rubicon a été franchi, le sauvetage de la Grèce, qui était d\'abord celui des banques, est devenu celui de ses créanciers publics, mais la restructuration de la dette va devoir se poursuivre... Un précédent a été créé qui s\'entoure dans l\'immédiat de faux-semblants : un transfert des profits de la BCE qui ne franchit pas la ligne rouge du financement direct d\'un État, l\'illusion accordée au FMI que la dette va à nouveau devenir soutenable. Elle repose sur l\'hypothèse particulièrement optimiste selon laquelle l\'excédent budgétaire primaire va se maintenir à 4,5% du PIB et la croissance nominale va rebondir à 4% annuels.Les pertes devront être un jour constatées par des créanciers désormais publics, impliquant que leurs aides actuelles - qui permettent accessoirement de financer les déficits, mais surtout de faire rouler leurs créances - sont prêtées pour leur grande part à fonds perdus. Pour la première fois, Angela Merkel vient d\'envisager une restructuration de la dette grecque, en la conditionnant au retour d\'un excédent budgétaire primaire, avec l\'espoir d\'une stabilisation de la dette. Cela sonne comme la première mise en cause d\'une stratégie défaillante.
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