La finance guérit, l'opinion gronde

Hier, JP Morgan Chase a annoncé que son bénéfice du troisième trimestre était remonté à 3,6 milliards de dollars. Le matin même, le « Wall Street Journal » avait publié une enquête annonçant que les 23 plus grands établissements financiers américains (banques, hedge funds, sociétés de Bourse?) distribueraient à leurs salariés 140 milliards de dollars de rémunération en 2009, davantage qu'en 2007, l'année qui précéda le grand plongeon. Le constat est là : on a tout fait pour sauver les banques et, semaine après semaine, les chiffres indiquent qu'on y est parvenu. Peu de voix s'élèvent pour affirmer qu'il aurait mieux valu s'abstenir. D'où vient alors ce malaise, perceptible aux États-Unis comme en Europe ? Il vient d'abord de la brièveté et de la violence du spasme qu'a subi la finance. Il y a un an, nous étions dans l'apocalypse mondiale, personne ne dormait plus, les gouvernements bouleversaient toutes les règles pour agir en urgence. Six mois plus tard, les marchés boursiers repartaient à la hausse, et depuis les bonnes nouvelles en provenance du secteur financier s'accumulent. Ces coups de balancier mettent à rude épreuve les capacités d'accommodation des opinions publiques. Deuxième sujet de malaise : l'économie réelle s'est beaucoup dégradée et se remet du choc bien plus lentement que la finance. Les faillites, le chômage, l'assombrissement des perspectives professionnelles forment le quotidien de millions d'hommes et de femmes. D'où un sentiment d'injustice, ceux qui sont vus comme les responsables de la crise ayant l'air de s'en tirer mieux que les autres. Troisième thème : l'argent dépensé. Pour éviter l'effondrement du système, les gouvernements ont déversé des liquidités par centaines de milliards de dollars (ou d'euros ou de roubles?). Cet argent a permis aux banques de recouvrer la santé et de rembourser plus vite que prévu les États. L'addition finale de l'aide aux banques sera moins monstrueuse qu'on ne le craignait. Mais cela ne changera rien aux déficits budgétaires et à l'endettement, qui explosent du fait de la récession. Ce sera aux contribuables de payer. Les conséquences sociales, parfois épouvantables, dureront elles aussi longtemps. Il est bon que le système financier retrouve des couleurs, parce qu'il fait partie des solutions à la crise. En revanche, il aurait grand tort de se montrer provocant. C'est le sens de l'enquête sur les rémunérations publiée par le « Wall Street Journal » : l'avertissement vient d'une presse amie, il est d'autant plus frappant. [email protected] Gherard
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