le grand rendez-vous international

Tenu pour la première fois en 1961 avec 328 exposants, devenu international six ans plus tard, le Salone del Mobile de Milan est le plus grand événement international dédié à l'ameublement. On raconte volontiers que ce serait aussi le troisième plus médiatisé après la Coupe du monde de football et le Festival de Cannes. D'un pur point de vue historique, le Salone del Mobile ne fut pas le premier à fédérer le secteur. En 1923, c'est d'abord la biennale d'artisanat d'art et d'aménagement intérieur installée qui lança le mouvement. Puis, la Triennale d'art et d'architecture qui a consacré les architectes et designers scandinaves, américains, suisses et bien naturellement italiens.Mais, à la fin des années cinquante, plan Marshall aidant, l'outil industriel italien s'affermissant, la filière du meuble italien s'est tout entière tournée vers le progrès, l'innovation, le futur. Il fallait au « made in Italy » un outil de promotion qui échappe à la théorisation. Quelques entrepreneurs de mobilier de la filière Federlegno-Arredo se réunissent alors pour fonder le « Comitato organizzatore del Salone del Mobile italiano », qui prend très vite le nom, aujourd'hui encore en vigueur, de Cosmit. À la charnière des années 1950-1960, le paysage italien de l'ameublement compte plus de 13.000 sociétés, emploie 205.000 personnes et diffuse sa production dans quelque 20.000 points de vente. Ce nouveau salon rencontre illico un succès national, puis international. Il se tient une fois l'an dans le parc des expositions de la Fiera, en pleine ville, et attire à chacune de ses sessions toujours plus de monde et de médias. Il s'ouvre aussi au grand public, implique la Ville dans ses projets culturels et suscite bien évidemment un « off » qu'on écume pour humer le grand air de la transgression postindustrielle et contestataire.Aujourd'hui, le Salone internazionale del Mobile est la vitrine active et colossale de Federlegno-Arredo, fédération professionnelle des industries du bois, de l'ameublement et de la décoration et quatrième fédération italienne parmi les plus importantes et productives du pays. Avec près de 3.000 entreprises, elle génère 41 milliards d'euros de chiffre d'affaires (2009). « Le système industriel hérité de l'Italie des métiers ancestraux, relevant de la microéconomie, est devenu une macroéconomie », résume Carlo Guglielmi. Installé depuis quelques mois dans le fauteuil de direction du Cosmit, Guglielmi est aussi le PDG de la société Fontana Arte. En 2009, le bilan du Salone del Mobile avait été meilleur que prévu avec 278.000 visiteurs, dont plus de 153.000 venus de 152 pays étrangers, 2.047 exposants et une couverture média assurée par plus de 4.800 journalistes. L'année 2010 s'annonce bien plus dure. « Le marché intérieur italien a baissé de 22 % », précise Carlo Guglielmi. Acteur pilier d'un secteur phare, l'homme ne masque pas les difficultés : « Le marché nous ramène à la dure réalité. » À l'export, la chute est de 25 % (? 30 % en Russie?; ? 40 % aux États-Unis). Avec la baisse de la consommation, nombre d'entreprises mettent la clé sous la porte, les licenciements vont de pair. Conséquence, le salon biennal Ufficio (mobilier de bureau et ambiance du travail), généralement porté par le bâtiment et qui devait se tenir cette année en même temps que le Salone, a été reporté à 2011, « mais comme nous sommes réactifs et optimistes, nous avons imaginé en pleine foire une ?Strada dell'Ufficio?, conçue à la mode du ?Playtime? de Tati et qui sert de réfectoire à plus de 350 personnes?! », indique Carlo Guglielmi.Chaque année, le salon et ses corollaires, « Complemento d'Arredo » (décoration) et « Satellite », plate-forme de lancement des jeunes designers du monde entier à peine sortis des écoles, se doublent de salons biennaux, chacun vitrine d'une des associations corporatistes officielles composant le Cosmit?: en 2009, se tenait ainsi « Euroluce » (luminaires?; depuis 1976). Cette année, place à « Eurocucine » (la cuisine et son spin off, « TFK-Technology for the kitchen? » ; depuis 1974), et le « Salone internazionale del Bagno » (le bain?; depuis 2003), qui occupent respectivement quatre et deux pavillons.Qu'on se le dise, le salon ne prime ni ne récompense personne. Ses plus gros exposants sont les firmes Flou, Molteni et Poliform. Ici, le design, en apparence omniprésent, ne représente que 5 % de l'ensemble de la production montrée. Histoire de remettre aussi quelques pendules comtoises à l'heure. Le Cosmit consacre une bonne part de son budget annuel à la culture. De fait, le Salone del Mobile de Milan 2010 entre en ville avec un programme culturel mis en place avec la municipalité?: la « Città dei Saloni » n'est pas seulement la ville des salons professionnels (avec ouverture au grand public les samedi 17 et dimanche 18 avril, journées où l'on attend 30.000 visiteurs), mais aussi celle des musées où le design pénètre hardiment pour l'occasion (voir encadré p. 33) grâce à la bonne volonté des meilleures galeries de la place.Depuis peu, l'impact provoqué sur le public par ces ouvertures incite les édiles locaux à prolonger, voire à pérenniser ces ouvertures. C'est une bonne chose.Pierre Leonforte
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