Une menace plus économique que militaire

À deux reprises le président Barack Obama consacrera quelques heures à la visite de sites culturels lorsqu'il sera à Pékin. Le président n'a semble-t-il jamais posé le pied sur le sol chinois auparavant. Au-delà des fiches de ses conseillers, il doit encore se forger sa propre opinion sur la Chine, ses ambitions sur l'échiquier international et la réalité de la « menace » qu'elle incarnerait.Les dépenses chinoises atteignent aujourd'hui environ 15 % du budget national, un taux deux fois plus important que celui de la croissance économique de la Chine. Officiellement, il s'agit de moderniser les moyens militaires nationaux. Mais « l'empire du Milieu ambitionne aussi de devenir la deuxième puissance militaire derrière les États-Unis, au lieu de la cinquième actuellement », estime Barthélémy Courmont, professeur invité à l'université du Québec et auteur de « Chine, la grande séduction » (Choiseul Éditions). « Parmi les signataires du traité de non-prolifération, la Chine est le seul à continuer à augmenter son arsenal », poursuit cet universitaire, ce que contestent les diplomates chinois. Et dans les milieux conservateurs américains, la question n'est plus de savoir si une confrontation avec la Chine aura lieu, mais quand elle aura lieu. Pour ces raisons, l'Europe maintient son embargo sur les armes en direction de la Chine, et les États-Unis le leur sur les hautes technologies. D'autant que le régime chinois n'est toujours pas une démocratie. Mais l'Occident fait-il une bonne analyse ?« Officiellement, la Chine veut s'intégrer progressivement et pacifiquement dans un monde qu'elle souhaite multipolaire, et affirme vouloir éviter le retour à un face-à-face du type USA-URSS », souligne Barthélemy Courmont. Il rappelle qu'en septembre à l'ONU, elle a signé comme les autres pays la proposition de Barack Obama en faveur d'un désarmement nucléaire. Par ailleurs, bien qu'en forte croissance, les dépenses d'armement chinoises sont dix fois inférieures à celles des États-Unis ?persuasionEn réalité, la politique extérieure de Pékin ne se joue plus ? ou plus seulement ? sur le registre militaire. La persuasion, les politiques culturelle et économique sont les nouveaux instruments au service de l'influence de la Chine. Depuis 2002, le régime populaire a constitué un réseau de 700 instituts Confucius dans le monde pour enseigner la langue et la civilisation chinoises. L'objectif est d'atteindre 1.000 instituts fin 2010 et 2.000 en 2015. Au-delà des États-Unis, dont elle est le premier créancier, la Chine prête maintenant à tout-va en Asie, en Afrique et en Amérique latine. « Pour certains de ces pays, il devient impossible de dire non à Pékin », affirme Barthélémy Courmont. Entre soft power et hard power, la politique extérieure chinoise relève du « sticky power » (pouvoir collant) selon le mot de Walter Russell Mead, spécialiste des relations internationales. Pékin cherche à se rendre indispensable auprès de ses partenaires, pour en faire des vassaux et peser sur leurs choix. En octobre, le président Obama n'a-t-il pas renoncé à rencontrer le dalaï-lama pour ne pas froisser Pékin ?
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