Face à une catastrophe aussi terrifiante que celle de la centrale nucléaire japonaise de Fukushima, les arguments rationnels sont presque instantanément vitrifiés par l'angoisse des opinions publiques, nourrie par le coeur des adversaires historiques ou opportunistes de l'atome. EDF a peut-être raison de tordre le coup aux contrevérités sur le danger des vieilles centrales ou des risques sismiques purs (hors tsunami). Areva est dans son bon droit en défendant la sécurité de ses réacteurs « anti-low cost » et le bienfait d'un surcoût lié à la protection des installations et des systèmes. Les experts sont dans le vrai quand ils soulignent que l'accident japonais est surtout dû au mauvais fonctionnement, insuffisamment anticipé, des systèmes de refroidissement. Mais tous risquent fort de rester inaudibles. Pour le grand public, le nucléaire recouvre aujourd'hui une seule réalité : celle d'une installation qui explose et qui brûle, exhalant son nuage mortel au-dessus du Japon, et non celle de la centrale française voisine qui n'a pas fait parler d'elle en vingt ans d'activité. Les défenseurs du nucléaire ont généralement tendance à minimiser l'aspect le plus terrifiant de cette énergie domestiquée (?) au XXe siècle : à la différence du pétrole, elle devient très vite un ennemi invisible, mille fois plus terrifiant que le gaz dont il faut surtout craindre la concentration. Face à l'atome libéré de ses chaînes, tel le mythique monstre japonais Godzilla, la seule défense efficace consiste à fuir. Une catastrophe potentielle de plus - surtout si Tokyo est touché - dans un pays aussi concentré humainement et économiquement que le Japon. Certes, nous n'en sommes pas là, ni à remettre en cause en France une énergie assurant les trois quarts de notre approvisionnement électrique. Mais l'émotion est encore trop forte pour en appeler à la raison quand domine le spectre des radiations. [email protected]

latribune.fr

16 Mars 2011, 21:28

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