Airbus se met au recyclage de matériaux composites

L'aéronautique, mais aussi l'automobile, la plaisance, l'ameublement, et bien d'autres secteurs encore, se mettent aux matériaux composites. Leur résistance et leur légèreté, en particulier, offrent une alternative intéressante aux métaux. Mais aujourd'hui, à tout matériau doit correspondre une filière de recyclage dédiée. Et il n'y a pas de temps à perdre, car la France a pris un retard considérable dans ce domaine. « Il n'y avait pas encore de gisements critiques justifiant un traitement », explique Pascal Dublineau, expert matériaux et procédés chez Airbus. Actuellement, les matériaux issus des déchets de production sont mis en décharge, broyés ou parfois incinérés en cimenterie. « Ces solutions ne sont pas satisfaisantes à long terme. Surtout avec l'usage croissant des composites dans l'automobile. À partir de 2015, 95 % du poids d'une voiture devront être recyclés », prévient Jérôme Soto, enseignant chercheur à l'Icam, école d'ingénieurs de Nantes.Chez Airbus, la production de déchets composites a triplé en trois ans, et, en 2010, la France en a produit 300 tonnes. « D'ici à quinze ans, 7.200 avions de la première génération de composites devront être démantelés », souligne Pascal Dublineau.Viabilité économiqueC'est pourquoi, l'avionneur a lancé avec le pôle de compétitivité EMC2 basé à Nantes, spécialisé dans les problématiques liées aux ensembles métalliques et composites, une initiative ambitieuse. Objectif ? Organiser une filière complète du recyclage, depuis la collecte des matériaux (traités en fonction de la technologie retenue pour le recyclage) jusqu'aux possibilités de valorisation commerciale des fibres recyclées.L'enjeu, bien entendu, consiste à mettre en place des solutions de valorisation économiquement viables. Une gageure étant donné que les matières premières qui entrent dans la composition des matériaux composites proviennent essentiellement du pétrole. Il s'agit de fibres longues (verre, carbone, métallique) imprégnées d'une résine soit thermodurcissable (polyester, polyvinyle, polystyrène), soit thermoplastique (Peek ou polyétheréthercétone, polyamide). La démarche de recyclage consiste à dissoudre la résine pour extraire les fibres et leur donner une seconde vie. Deux technologies sont privilégiées. La thermolyse, utilisée en Grande-Bretagne et en Allemagne, qui consiste à carboniser la résine, présente un bilan carbone peu satisfaisant. La solvolyse, elle, repose sur un procédé chimique à partir d'eau portée à haute pression (200 bars) et chauffée à haute température (400 °C). Deux démonstrateurs du réacteur chimique permettant de réaliser cette opération ont été mis au point par la société nantaise Sacmo, dans le cadre d'un programme de recherche labellisé par EMC2. « Nous prévoyons une commercialisation de cette machine en fin d'année », annonce Mathieu Beaulieu de la Sacmo.Reste maintenant à trouver « une solution de traitement de la résine mélangée à l'eau », souligne Pascal Dublineau. Dans le cadre de la création de l'IRT Jules Verne sur les matériaux avancés (Institut de recherche technologique), candidat pour l'appel à projets du gouvernement sur les investissements d'avenir, Airbus prévoit de construire, d'ici à début 2012, une unité de recyclage pilote utilisant la solvolyse. Un appel d'offres va être lancé en mai pour réunir autour de ce projet (estimé à 5 millions d'euros) des candidats issus de la filière recyclage, des universitaires et des professionnels du génie chimique.
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