L'UEFA, piètre agence de notation

Sur les pelouses des terrains de football, la France a perdu son « triple A ». Reléguée à la sixième place à l’indice UEFA des clubs, elle est exclue du Big Five européen au profit du Portugal. A première vue, ce déclassement est un échec pour la Ligue de Football Professionnel (LFP) et son président Frédéric Thiriez : années après années, les clubs français voit leur niveau s’éloigner de celui des ténors du football européen : FC Barcelone, Real de Madrid, Chelsea, Manchester United, Bayern de Munich...Il est, en réalité, profondément injuste de stigmatiser le football français pour cette dégradation. Le classement UEFA, construit sur les performances des équipes de chaque nation dans les compétitions continentales lors des 5 dernières années, ignore les dérives financières qui ont conduit à ces résultats. Dans son dernier rapport financier (relatif à l’exercice 2010) l’instance européenne indiquait que les pertes annuelles des 734 clubs professionnels continuaient à croître, pour atteindre désormais 1,46 milliards d’euros (en progression de 36 % relativement à l’exercice précédent). Dans le même temps, celles des clubs français diminuaient de 32 % (de 193 à 130 millions d’euros). Mieux encore, l’endettement des clubs français est contenu (100 millions d’euros), tandis que celui des clubs anglais, espagnols et italiens est désormais insoutenable (plus de 10 milliards d’euros au total). La hiérarchie sportive en Europe est, en grande partie, le fruit d’une partie de dés pipés. Depuis plusieurs années, les grands clubs espagnols, italiens et anglais captent illégitimement la quasi-totalité des grands talents mondiaux. Il en résulte des performances déséquilibrées et une rétrogradation contestable du football français. L’exception notable à cette transgression de l’équité sportive est la situation des « fourmis » allemandes (et en particulier du Bayern de Munich) qui, bien que financièrement vertueuses, parviennent à s’intercaler entre les « cigales » espagnoles, anglaises et italiennes. Quant à la promotion portugaise, elle s’appuie sur les performances d’un petit nombre d’équipes dans une ligue très déséquilibrée (au contraire de la première ligue française, fortement équilibrée).Le système d’indice de l’UEFA est une provocation au regard de la logique sportive et un « pousse-au-crime » : il récompense l’incurie et pénalise la vertu des ligues nationales. Il est à l’exact opposé de l’esprit des systèmes visant à restaurer l’équilibre compétitif -tel que le draft dans certaines ligues nord-américaines-. Il ignore la présence massive, dans les comptes des plus grands clubs, « d’actifs » toxiques (ceux des joueurs dont le salaire est le plus en décalage avec leur capacité à générer de la valeur).La France a choisi depuis longtemps la voie de vertu financière en plaçant ses clubs sous les fourches caudines d’un organisme de contrôle et de sanction, la Direction Nationale du Contrôle de Gestion (DNCG). L’Europe entière loue son action à tel point que le « fair play financier », très courageusement promu par Michel Platini (actuel président de l’UEFA), sera mis en place, dans quelques mois, dans le football européen. Ses règles ne sont pas exemptes de reproches, car elles risquent de figer des positions obtenues en s’appuyant sur les excès du passé. Néanmoins, elles vont dans sens d’une certaine conception de l’équité sportive. Par une amère coïncidence, ces règles entreront en application à l’instant précis où la dégradation de la France par l’UEFA prendra effet sur la scène continentale… 
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