Le procès Messier aborde la question du délit d'initié

Le procès Messier a abordé mercredi et jeudi les accusations de délit d'initié. Trois ex-dirigeants de Vivendi Universal (le PDG Jean-Marie Messier, le directeur financier Guillaume Hannezo et le vice-président Edgar Bronfman Jr) sont jugés pour avoir vendu d'importantes quantités de titres quelques jours avant le 7 janvier 2002. Ce jour-là, Vivendi Universal (VU) annonçait le placement de 55 millions d'actions auprès de Deutsche Bank et Goldman Sachs, récoltant ainsi 3,3 milliards d'euros. Manque de chance : AOL Time Warner annonce quelques heures après une dépréciation massive d'actifs, qui fait chuter le cours de VU. Les deux banques auront donc le plus grand mal à replacer les actions sur le marché, et perdront au total 600 à 700 millions de dollars dans ce placement (dont 380 millions d'euros pour la Deutsche Bank). Le juge d'instruction Jean-Marie d'Huy a estimé que les trois dirigeants étaient, lorsqu'ils ont cédé leurs titres, au courant du projet de placement d'actions. «  C'est à compter de début décembre 2001 que les banques ont été sollicitées par VU pour faire des propositions de montage relatif au placement », écrit le juge d'Huy, qui a retrouvé moult documents préparatoires s'étalant durant tout le mois de décembre 2001. Ce projet a aussi été évoqué lors d'un conseil d'administration le 14 décembre 2001 en présence d'Edgar Bronfman Jr.explicationsPour leur défense, les prévenus affirment au contraire que le placement s'est décidé au tout dernier moment, soit après la vente de leurs titres. Selon Jean-Marie Messier, « ce placement n'a commencé à exister que lorsque les banques ont fait des offres fermes, c'est-à-dire le 4 janvier 2002. Il y a même eu une bataille entre les banques le week-end du 5-6 janvier 2002, car Goldman Sachs voulait absolument faire partie de l'opération... ». Edgar Bronfman Jr, qui a gagné 12,8 millions de dollars en vendant un paquet de titres le 4 janvier 2002, risque en théorie une amende de 10 fois ce gain - en pratique, les tribunaux imposent plutôt une amende d'une fois le gain. Jeudi, l'actuel patron de Warner Music, venu exprès des États-Unis, dépassant tout le monde d'une tête, ayant du mal à suivre des débats dans une langue étrangère, et qui aurait visiblement préféré échapper à cette infamie, s'est expliqué : « Le 3 janvier 2002, alors que j'étais en vacances dans l'île d'Anguila, Doug Morris [le patron d'Universal Music, Ndlr] m'a appelé pour me souhaiter bonne année, et, au cours de la conversation, il m'a indiqué que le cours de l'action était élevé. » L'héritier Bronfman donne alors instruction de vendre des titres. Lors de l'enquête, Pierre Lescure jugera cette explication « pas crédible », ajoutant ironiquement : « Il faut toujours penser à présenter ses voeux à Doug Morris... »
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.