« En libéralisant à outrance, on a réenclenché un cycle dans lequel des gens vont mourir de faim »

STRONG>Christian Pèes, président de Groupe Euralis, coopérative agricole du Sud-OuestQue pensez-vous de l'évolution des cours des matières premières agricoles ?En tant qu'agriculteurs, nous avons subi la dégringolade des cours. Maintenant, ils s'envolent ; mais globalement, les variations brutales de prix ont un impact négatif sur l'agriculture. Le blé, le colza, le maïs, le riz et le soja représentent directement ou indirectement 80 % de l'alimentation de la planète. Or, leurs variations relèvent des montagnes russes, alors que les pays sont autosuffisants à 90 %. Les cours sont déterminés par cette frange de 10 % des produits qui s'échangent entre pays : ce n'est pas normal !En quoi la libéralisation des marchés favorise-t-elle la volatilité des prix ?Notre intuition, c'est que la mise en compétition des agricultures du monde entier aboutit à des choses aberrantes, notamment une pression baissière des prix parfois, parce que les conditions de production sont très différentes. Par exemple, le climat, le coût de la terre, les contraintes sanitaires, sociales et environnementales au Brésil sont tout à fait différentes des nôtres. Si on laisse faire totalement le marché, le pays pourrait facilement produire la moitié des volailles consommées dans le monde. Cela pose des problèmes sanitaires, mais aussi politiques. À notre avis, cela n'est pas raisonnable de laisser le marché tout arbitrer en agriculture : il faut répartir les risques sur les différents continents.Quelle solution proposez-vous ?Il faut une régulation forte des matières premières agricoles. Toutes les grandes régions agricoles le font : la Russie, l'Inde, la Chine. Encadrer les prix dans chaque grande région peut être une solution, tout en imposant des stocks minimaux, soit 3 mois de consommation pour les céréales, par exemple. Cela permet de limiter les variations de prix, ce qui bénéficie aussi aux plus pauvres. En libéralisant à outrance, on a réenclenché un cycle dans lequel des gens vont mourir de faim.
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