La confiance a disparu de l'expérience France

Radicalisation, extrêmisation… Les mots de François Fillon semblent, pour de nombreux observateurs, accompagner des mouvements révélés par sondages, profonds mais inconsidérés ou immatures des électeurs de l\'UMP.S\'agit-il seulement des sympathisants UMP ? Il apparaît plus probable, malheureusement, les enquêtes sociétales nationales ou internationales le montrent en continuité, que c\'est le corps social de notre pays dans sa majorité, et en son cœur l\'ensemble de la classe moyenne, qui se déplace et qui à tort ou à raison, a le sentiment grandissant que l\'insécurité et l\'injustice accompagnent une impuissance générale des dirigeants et des acteurs sensés les représenter. Entre démocratie de l\'incertitude et société du risque, la confiance a disparu de l\'expérience France. Définitivement ?La longue liste négative de l\'expérience françaiseNous sommes un pays où l\'expérience du chômage frappe depuis longtemps toutes les familles et est devenu un fruit amer désormais partagé entre parents et enfants. Un pays où les études supérieures ne garantissent plus le premier emploi, encore moins la réussite économique. Un pays où l\'on se trouve de plus en plus au placard, puis sur le trottoir au delà de 55 ans au même moment où l\'on allonge la durée des cotisations nécessaires à l\'obtention d\'une retraite. Un pays dont le système éducatif dégringole au classement de l\'OCDE. Un pays où devenir propriétaire d\'un bien immobilier devient sinon une chimère, un privilège. Un pays où un train ayant déraillé, les victimes furent détroussées par de nouveaux sauvages.Un pays où un commissariat de police fut pris d\'assaut au prétexte d\'un contrôle de police ayant mal tourné. Un pays où la taxation sous toutes ses formes atteint une dimension castratrice et où on imagine même prélever 75% d\'un flux. Un pays où pourtant l\'intervention solidaire publique se réduit chaque jour. Un pays où les partis politiques ne pensent plus l\'avenir et se perdent en luttes de pouvoir et débats sans fin sur les petites phrases. Un pays où le cumul des mandats politiques, des mandats d\'administrateurs de grandes sociétés, des espaces médiatiques... est le plus développé au monde. Cette longue liste négative de l\'expérience française pourrait être encore allongée et elle est pourtant malheureusement vécue directement ou indirectement par la très grande majorité des français.Des mouvements alternatifs apparaissentPour autant les mouvements des bords extrêmes de notre échiquier politique sont-ils devenus les partis majoritaires dans ce pays ? Évidemment non ! Notre pays crie, le plus souvent, mais de moins en moins, en silence. Des mouvements alternatifs naissent et se déploient, des pans entiers de notre société s\'éloignent du contexte de représentation républicain des partis, Front National compris. L\'abstention n\'est qu\'un des visages de cette migration.Une croissance exponentielle de la communication, qui révèle l\'impuissance des émetteursUn divorce profond s\'est installé entre la république des citoyens et celle des élites quelles qu\'elles soient. La communication est pourtant omniprésente. On n\'a jamais autant émis, commenté, réémis de messages à destination des français. Tous nos écrans, omniprésents, sont pleins de politique. Une croissance exponentielle qui révèle d\'autant plus l\'impuissance des émetteurs face aux changements du Monde eux-mêmes déversés en flux continu dans lesdits écrans.A l\'heure des réseaux et du 2.0, il y a comme une absence de conversation véritable. Comme dans de nombreux pays, comme au Brésil cet été, c\'est dans la rue et les communautés digitalisées que l\'on retrouve la rupture entre société civile et élites dirigeantes. Comme dans un vote virtuel permanent qui loin d\'être simplement réactif et ignorant, comme beaucoup voudrait le décrire, est profondément informé et relié à la fois aux expériences de vie que je citais plus haut mais aussi à une compréhension des nouveaux enjeux du Monde.Nos chances demeurent grandesPourtant nos chances demeurent grandes et surtout nos capacités humaines, jeunes et moins jeunes, sont un avenir riche qu\'il faut promouvoir et orienter dès l\'école et sans cesse, à tous niveaux vers le haut, entre progrès, créativité et expansion plutôt que vers le bas de la dépression contrôlée et du déclin individuel et collectif.  *Jean-Christophe Gallien est professeur associé à l\'Université de Paris 1 la Sorbonne, Membre de la SEAP, Society of European Affairs Professionals
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