Comment François Hollande va peut-être réussir à réformer les allocations familiales

Les réactions à droite, mardi, aux propositions des parlementaires PS sur les allocations familiales ont été convenues. On a crié au démantèlement, mais sans beaucoup d\'angle d\'attaque. Le gouvernement, qui travaille en liaison avec des parlementaires PS, devrait sans doute s\'inspirer des propositions présentées par les députés socialistes Gérard Bapt et Pascal Terrasse, pour réformer les allocations familiales. Elles sont, il est vrai, plutôt habiles. Diminuer les allocations des familles dites aisées (mais sans les supprimer) et restreindre les prestations liées à la garde d\'enfants de ces mêmes familles dites riches, voilà qui est en effet assez « malin ».La bronca des allocations familialesPlus en tous cas que ne l\'avait été la pure et simple mise sous conditions de ressources des allocations - autrement dit, leur suppression au-delà d\'un certain revenu - décidée en juin 1997 par Lionel Jospin, et appliquée une année seulement : devant la bronca des associations familiales, le gouvernement avait alors dû faire machine arrière.La leçon a manifestement été tirée de cet échec. Réformer les prestations sociales est un sport à haut risque, les gouvernements le savent de mieux en mieux. Il faut souvent pas grand\'chose pour mettre à bas tout un projet. Exemple : Nicolas Sarkozy voulait de que sa Révision générale des politiques publiques (RGPP) s\'attaque non seulement aux structures administratives, mais aussi aux dépenses d\'intervention. Un première idée avait été émise, consistant à restreindre le champ d\'application des cartes de réduction SNCF pour familles nombreuses. Devant « l\'émoi » , la surchauffe médiatique sur ce sujet - qui n\'en était qu\'un, jugé peu essentiel par le gouvernement, parmi beaucoup d\'autres idées de révisions des politiques -, l\'exécutif avait abandonné non seulement cette piste mais aussi toute velléité de toucher aux prestations sociales.Le terrain a été préparéAujourd\'hui, s\'agissant des allocations familiales, le terrain a déjà été préparé. L\'opinion a été effrayée par des perspectives de fiscalisation, évoquées par le premier président de la Cour des Comptes, Didier Migaud. Comme toujours, en matière d\'impôt, même si beaucoup de foyers n\'auraient payé aucun impôt supplémentaire, ou très peu, tous se seraient inquiétés. Le gouvernement en a tenu compte. Après les déclarations de la ministre des affaires sociales, Marisol Touraine, qui s\'est déclarée hostile à la fiscalisation, cette piste de l\'imposition des allocations familiales semble bel et bien écartée.Il s\'agira bien d\'économiser entre 2,5 milliards et 3 milliards d\'euros sur les allocations familiales versées. Le total de celles-ci, hors aides au logement, atteindra 32 milliards en 2013, selon la commission des comptes de la sécurité sociale.L\'habileté de la proposition des députés consiste donc à ne pas supprimer les allocations familiales, mais à les diviser par deux au-delà d\'un certain revenu, lequel dépend des charges de famille. La fameuse universalité des prestations famille, un principe défendu par toutes les associations familiales, n\'est donc pas frontalement remise en cause, peuvent affirmer Gérard Bapt et Pascal Terrasse.Faire passer des décisions difficiles...Le seuil évoqué est de 53.000 euros de revenus annuels pour un couple avec deux enfants, et « un peu plus de 61.000 euros » pour une famille avec trois enfants. Tout cela est plus complexe, donc moins évidemment brutal, que l\'annonce de Lionel Jospin : de sa déclaration de politique générale, on avait surtout retenu la suppression des allocations au-delà de 25.000 francs (3.811 euros) par mois. Une mesure franche et claire, ce qui n\'est pas toujours l\'idéal, quand l\'objectif est de faire passer une décision difficile...Aujourd\'hui, en réalité, l\'économie porterait surtout sur les aides à la garde d\'enfants, que les parents bénéficiant de « hauts » revenus - au-delà des seuils évoqués - ne toucheront plus. Leur suppression représentera une baisse de dépense de deux milliards d\'euros, contre un milliard pour la réduction des allocations de base.Des prestations coûteuses pour la garde d\'enfantsCes prestations sont coûteuses : si les « allocs » de base, versées aux familles comptant au moins deux enfants, représenteront 12,9 milliards d\'euros en 2013, les prestations dites « complément de mode de garde », concernant la garde de jeunes enfants, sont estimées au total à 5,8 milliards d\'euros. Elles sont déjà modulées selon le revenu. Avec la réforme proposée, elles disparaîtraient. Les députés PS soulignent que ces aides bénéficient surtout aux ménages aisés. Ce qui est logique, dans la mesure où, dans les foyers modestes, la plupart des jeunes enfants sont gardés par leurs parents (c\'est le cas pour plus de 80% des enfants, s\'agissant des 40% de foyers les plus modestes).Demander un effort aux plus riches en temps de crise, voilà qui est plus facilement défendable que fiscaliser tout le monde...
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