Angela Merkel recadrée par la Cour constitutionnelle de Karlsruhe

Coup de semonce pour Angela Merkel. Dans une décision annoncée ce mardi, la Cour constitutionnelle de Karlsruhe a considéré que son gouvernement avait violé les droits du parlement concernant la création du Mécanisme européen de Stabilité (MES) et le « pacte euro-plus », aussi appelé « pacte de compétitivité ». Cette décision n’a pas de conséquence sur la procédure de ratification du MES qui, en théorie, devrait s’achever par le double vote du Bundestag et du Bundesrat. Mais elle oblige désormais Berlin à modifier son mode de gouvernance.Définition des Affaires européennesLa Cour de Karlsruhe a fondé sa décision sur l’article 23-2 de la Loi Fondamentale, la constitution fédérale allemande, qui prévoit que « dans les affaires européennes, le gouvernement fédéral doit entièrement informer le Bundestag et le Bundesrat et ce, le plus tôt possible ». Jusqu’ici, le gouvernement fédéral considérait que le MES ne relevait pas des « affaires européennes » puisqu’il s’agit d’un traité international. Les Juges lui ont donné tort en précisant que les « affaires européennes » concernent non seulement les traités européens en tant que tels et les directives de l’UE, mais aussi « les traités internationaux qui conduisent à des ajouts du droit européen ou qui ont des relations de proximité avec ce même droit ». Autrement dit, les deux sujets concernés par la plainte déposée par le groupe verts au Bundestag entre bien dans le cadre de l’article 23-2.Information précoce et réelleLes juges en rouge en ont aussi profité pour préciser le droit d’information prévue par la Constitution. « L’information du Bundestag doit être ouverte suffisamment en avance pour disposer d’une réelle influence sur la constitution de la volonté du gouvernement fédéral », précise le jugement qui ajoute que « le parlement ne doit pas avoir qu’un rôle d’enregistrement ». Pas question donc de faire sanctionner a posteriori des décisions prises en conseil européen. Mieux même, Karlsruhe estime que cette procédure doit avoir lieu avant même que le gouvernement ne s’exprime publiquement, surtout lorsque ces déclarations lient l’Allemagne. Enfin, Karlsruhe rejette tout argument de complexité en indiquant que « plus le dossier est complexe, plus approfondie doit être la capacité d’intervention du Législatif ».Future ligne de conduiteCe blâme de Karlsruhe est loin d’être neutre. Il définit la future ligne de conduite du gouvernement d’Angela Merkel dans les affaires européennes. Plus question désormais de décider d’une ligne de conduite sans avoir consulté le Bundestag. Désormais la position européenne de l’Allemagne sera toujours soumise à cette épée de Damoclès. Car pour ne pas être sanctionné par Karlsruhe, Berlin pourrait être tenté d’adopter des propositions parlementaires. Le gouvernement a salué cette décision \"qui clarifie la procédure\" et a indiqué \"vouloir examiner comment adapter les procédures à cette décision\"Suite logiqueCe jugement est la suite logique des décisions de Karlsruhe depuis 2009 et sa décision sur le Traité de Lisbonne. Avec l’échec de la Constitution européenne, la Cour a pris acte du fait que l’UE n’est pas un Etat fédéral. En conséquence, l’organe de la souveraineté nationale, le Bundestag, doit avoir un contrôle aussi large que possible de toutes les décisions qui influent sur la souveraineté allemande : que ce soit en aval par la ratification, ou en amont par l’information. Les juges avaient ainsi contraint Berlin à instituer une sanction parlementaire à tout versement allemand au Fonds européen de stabilité financière.
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