Bolsa Familia, l'aide sociale lancée par Lula,

Renata do Nascimento serre les dents lorsqu'elle raconte son histoire. « J'ai 39 ans, mais je me suis retrouvée veuve très jeune, seule avec mon fils. » Sans formation, elle n'avait jamais réussi à décrocher d'emploi stable de sa vie, tout juste quelques ménages. « Je n'avais plus aucune ressource, j'avais pratiquement perdu espoir », raconte-t-elle sur le perron de sa maison dans une favela de Niteroi, dans la banlieue de Rio de Janeiro. Un jour, un voisin lui a parlé de Bolsa Familia, l'allocation lancée par le gouvernement Lula, et destinée aux foyers les plus pauvres. « Il m'a dit, tu vas voir, ce n'est pas beaucoup d'argent, mais ça va t'aider. J'ai pu acheter de quoi manger, et des habits pour mon fils. Petit à petit, j'ai remonté la pente », assure-t-elle, tout sourire. Pour son fils Erao, la vie a changé : pour avoir droit à cette allocation, Renata s'engage à ce qu'il ne manque jamais l'école, et à maintenir son carnet de santé à jour. Impact multiplicateurComme elle, quelque 12,6 millions de foyers, soit près de 60  millions de Brésiliens, reçoivent aujourd'hui la Bolsa Familia, considérée comme le plus important transfert de revenus du monde. Le montant perçu par chaque famille est modeste - compris entre 22 et 220 réis, soit 10 à 100 euros, selon le niveau de revenus et le nombre d'enfants - mais il permet de s'offrir de la viande et des fruits. Dans les villes les plus pauvres, l'allocation a un impact multiplicateur : le petit commerce est revitalisé par l'émergence d'une myriade de micro-consommateurs, freinant l'exode rural. « C'est d'une efficacité redoutable, et tout cela, pour un coût ridicule : moins de 0,5 % du PIB ! », pointe Marcelo Neri, économiste de la Fondation Getulio Vargas, à Rio de Janeiro. Bolsa Familia est le programme phare d'une batterie de mesures qui ont bouleversé la vie des plus pauvres. Dans les campagnes, le gouvernement a apporté l'électricité à 10 millions de familles, installé des citernes d'eau chez 2 millions d'habitants des zones arides, et renforcé l'agriculture familiale à travers des crédits et en lui assurant des marchés comme celui des cantines scolaires. Dans les villes, c'est la hausse du salaire minimum, de 54 % entre 2003 et 2010, qui change la donne. Elle bénéficie à 27 millions d'employés et 18,5 millions de retraités, dont la pension est indexée sur le salaire minimum. Conséquence : entre 2001 et 2008, le revenu des 10 % les plus pauvres a augmenté de 72 %, en termes réels, alors que celui des 10 % les plus riches progressait de 11 %. C'est la plus importante réduction des inégalités de l'histoire du Brésil. L'impact sur le vote est sensible. Dilma Roussef, la candidate propulsée par Lula pour lui succéder, devrait, selon les sondages, l'emporter dès le premier tour, avec 24 points d'avance sur son principal adversaire. « En 1992, le slogan de campagne de Bill Clinton aux États-Unis était ?c'est l'économie, stupide !?, au Brésil, ?c'est le social, stupide !? qui explique la dynamique de l'élection », résume Marcelo Neri. La droite s'en est aperçue tardivement. Après avoir baptisé « Bolsa Familia », « Bolsa Esmola » (bourse aumône), elle promet aujourd'hui de maintenir et d'étendre le programme en cas de victoire. « Peut-être, mais moi, je préfère faire confiance à Lula, et à celle qu'il a choisie pour lui succéder. Je vote Dilma », assène Renata.
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