Bob Diamond, l'arrogance bancaire

L'arrogance bancaire a un nouveau visage en Grande-Bretagne : le bien-nommé Bob Diamond, directeur général de Barclays. Cela fait des années qu'il flirte avec les limites de la patience du grand public. Depuis deux mois qu'il est à la tête de Barclays, il a largement franchi les bornes. Dans l'esprit britannique, cet Américain remplace progressivement le « méchant » banquier Fred Goodwin, qui avait mené à la faillite Royal Bank of Scotland et avait incarné les années d'excès. Ce week-end, les Britanniques ont pris un début de revanche, au moins symbolique : envahissant une trentaine d'agences de la banque à travers la Grande-Bretagne, des manifestants ont organisé des sit-in bon enfant, protestant en particulier contre la faiblesse de son ardoise fiscale.Sourire scintillant à l'américaine, ton toujours poli et mesuré, mais une confiance en soi inébranlable et glaciale, Bob Diamond est l'incarnation du banquier d'affaires. Son succès est évident : il a révolutionné la division banque d'affaires de Barclays en une quinzaine d'années, en faisant l'un des géants mondiaux. Au passage, il a empoché des dizaines de millions d'euros (sans doute une centaine au total). Désormais à la tête de Barclays, l'homme est aussi doué en affaires financières que piètre juge de l'opinion britannique. Début janvier, sa prestation face à un comité parlementaire britannique aux finances était d'une rare arrogance. « La période des remords et des excuses (de la part des banques) doit cesser », a-t-il affirmé dans un calme olympien, face aux attaques répétées de la douzaine de députés qui l'interrogeaient.La semaine dernière, Bob Diamond a confirmé son total désintérêt pour l'opinion publique. Pour contourner la (légère) baisse des bonus qu'il a accepté d'imposer à ses employés, il a augmenté leurs salaires fixes de 20 % en moyenne. L'homme va-t-il lui-même renoncer à son bonus, potentiellement de 9 millions d'euros ? Il rechigne, et il faudra attendre la publication du rapport annuel le mois prochain pour connaître sa décision. Enfin, ce week-end a apporté la goutte qui a fait déborder le vase. Dans une lettre aux députés britanniques, Bob Diamond a dévoilé le montant de l'impôt sur la société que Barclays a payé en Grande- Bretagne en 2009 : 134 millions d'euros. Soit 2,5 % de son bénéfice avant impôts. Pour mémoire, l'impôt sur les sociétés en Grande-Bretagne est de 28 %. Bien sûr, la banque se défend en affirmant qu'une grande partie de ses bénéfices venait de l'étranger, où elle paie des impôts. Son taux d'imposition total serait de 23 % en 2009, selon ses propres calculs. Ces arguments sont techniquement corrects. Dans le monde doré de Bob Diamond, tout cela est logique : il n'a rien fait d'illégal et son succès de banquier est indiscutable - même si Barclays a sans doute frôlé la catastrophe en 2008. Mais du point de vue du grand public, c'est incompréhensible. Les mairies britanniques, pour lesquelles les coupes budgétaires entrent en vigueur en avril, vont licencier plus de 100.000 personnes dans les mois qui viennent. Et tout cela, pour l'opinion, à cause de la crise bancaire. De voir les banques ne faire preuve d'aucune retenue est intenable, notamment politiquement. Ce que Bob Diamond ne comprend pas est la notion toute britannique de décence. L'ignorer peut être dangereux. Le secteur bancaire n'est pas à l'abri de nouvelles régulations.
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