Nesfluid : les dessous d'un lancement risqué

Nestlé s'apprête ce mercredi à lancer une nouvelle ligne de boisson en grandes pompes. Pas moins de quatre heures de présentation à la presse pour un nouveau jus à base de lait de coco et de petit-lait, censé allier hydratation et nutrition. Il sera décliné en six variétés enrichies chacune en certains nutriments et vitamines. Elles s'appellent Protect, Vitalise ou Renforce, des noms qui fleurent bon le produit santé/bien-être cher à Nestlé. Selon la distribution, le leader mondial de l'agroalimentaire en attend 3,5 millions d'euros de chiffre d'affaires d'ici décembre. Un vrai défi car ce lancement intervient dans un contexte difficile pour les produits à connotation santé. Depuis quatre ans, l'EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments) a considérablement durci sa réglementation en matière d'allégations santé. Du coup, tous les grands groupes comme Danone, Kraft ou Ferrero ont retiré leurs dossiers en attente d'une improbable validation. Et plus aucune véritable innovation ne sort en la matière. Pour passer entre les gouttes, Nestlé a donc rusé en n'utilisant que des ingrédients simples déjà reconnus et autorisés par l'EFSA : calcium, polyphénols, vitamine C, etc. « Le sélénium, qui est un antioxydant est reconnu pour ses vertus protectrices, ce qui permet d'appeler le produit Protect, c'est très malin », commente Béatrice de Reynal, créatrice du cabinet de conseil Nutrimarketing. 1,65 euro les 25 clNestlé risque pourtant de se heurter à un autre obstacle, le ras-le-bol des Français pour les produits à connotation santé. Les fioles de jus de fruits et légumes Knorr Vie d'Unilever, les yaourts beauté Essensis de Danone, les eaux Vitamin Water de Coca-Cola sont tous réduits à l'état de niches ou même arrêtés. Nesfluid risque d'autant plus d'être rejeté que sa communication est déjà critiquée par les nutritionnistes. « Depuis quelques mois, ils inondent Internet pour faire croire que l'eau de coco est plus hydratante que l'eau et la disent même proche du plasma sanguin, ce qui est complètement faux », s'énerve Béatrice de Reynal. Mais Nestlé n'en a cure. Son but : imposer son produit dans tous les linéaires boisson de France avant la première campagne télévisée du 4 octobre. Même si les distributeurs interrogés sont très sceptiques. « Vu son prix et sa taille nous avons fait le pari en interne qu'il sortait du rayon avant un an », s'amuse l'un d'eux. En effet, la fiole de Nesfluid sera vendue 1,65 euro les 25 cl contre, par exemple, 1,30 euro la bouteille de 1,5 litre de Coca. Pourtant, le produit sera référencé dans toutes les centrales. « Normal, Nestlé est passé sous nos fourches Caudines », continue le distributeur. Y compris en acceptant des campagnes promotionnelles en rayon de près de 100.000 euros chez Carrefour ou Leclerc ou des livraisons à la demande, et presque au carton, quand les autres produits du groupe sont livrés par camions entiers pour optimiser les coûts. « Nous ne voulions pas nous retrouver avec des mois de ce produit sur les bras », conclut le distributeur. Mais Nestlé, lui, veut y croire. Une deuxième campagne de publicité d'un mois est déjà prévue pour décembre et le produit sera étendu à toute l'Europe si le lancement français est concluant. Nestlé a tout de même pris soin de créer une division à part pour le produit. Au cas ou ?
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