L'intelligence économique, remède à une compétitivité rampante

Le pacte Ayrault pour la compétitivité a fait allusion à plusieurs reprises à l'intelligence économique. Spécialistes de ce secteur, chefs d'entreprise sensibles à ces problématiques dans le secteur du numérique, de l'industrie ou des services, enseignants et représentants des pouvoirs publics, étaient rassemblés à l'Ecole Polytechnique pour la 18e Journée nationale de l'intelligence économique. Et tous avaient leur petite idée sur la manière dont il faudrait faire davantage appel à l'intelligence économique pour restaurer la compétitivité française.Passage en revue des différents remèdes prescrits.Mieux gérer l'informationPatrice Allain-Dupré, président du groupe ESL & Network et enseignant à l'Ecole Polytechnique, a fait la démonstration du stress engendré par la quantité d'information gérée par les entreprises en dessinant des courbes au tableau de l'amphi Gay-Lussac. "La quantité d'informations véhiculée dans le monde croît à peu près à la vitesse de 22% par an. Le problème, c'est que ce 22% génère lui-même une courbe de complexité, donc de fragilisation, qui croît encore plus vite que la courbe de l'information. Nous sommes ainsi dans une situation de risque permanent. Plus un système est équipé pour traiter de l'information, plus il est compétitif. La valeur ajoutée d'un secteur ou d'une entreprise est liée à sa capacité à traiter de l'information. Bref, si vous êtes très bien informé, vous êtes un peu moins con que celui qui l'est moins!"Valoriser l'innovationAncien délégué général pour l'Armement, Henri Conze a quant à lui insisté sur le rôle des PME dans le développement d'innovations, mais déploré leur fuite à l'étranger: "Nous avons un tissu de petites entreprises porteuses de technologies remarquables, dans des niches d'activité extraordinaires. Le problème, c'est que nos responsables, comme l'opinion publique, ne le savent généralement pas. Souvent, les initiateurs de technologies partent avec armes et bagages se développer aux Etats-Unis. Et le pire, c'est que cet exil est présenté comme un cocorico par la France, alors que c'est un des exemples malheureux de la désindustrialisation du pays".A ce sujet, Paul Benoît, polytechnicien et président-fondateur de la start-up Qarnot Computing, estime aussi que le plus important, c'est que les innovations stratégiques puissent être lancées rapidement en France plutôt qu'ailleurs. Pour sa part, Gilles Babinet, entrepreneur français, aujourd'hui représentant auprès de la Commissaire européenne chargée du numérique, a estimé que "l'intentionnalité de l'Etat" devait être plus évidente vis-à-vis de la chose numérique. A ce sujet, Henri Conze met en garde: "L'Europe et la France ont loupé le premier train d'Internet, il faut à tout prix monter dans le deuxième. Cela demande une mobilisation générale et une politique européenne en la matière qui n'existe pas aujourd'hui. C'est là qu'est le véritable défi".Protéger le savoir-faire des entreprisesJean-François Phelizon, directeur général adjoint de Saint Gobain, affirme que "gérer une entreprise, c'est choisir entre plusieurs risques en permanence. Les risques numériques sont nombreux: risque d'image, d'intrusion, de mise sur le domaine public d'infos stratégiques... Il faut mieux les assumer, les connaître, les dimensionner et les réduire à un niveau acceptable".Pour Henri Conze, l'Etat devrait légiférer dans ce domaine: "Pourquoi ne pas créer un code des entreprises comme nous avons un code civil? Par exemple pour mettre un terme au rapt par les grandes entreprises de technologies des petites. Tant que nous n'aurons pas compris tout cela, la PME restera coincée entre les deux branches du casse-noisettes: sa banque et son client majoritaire". Philippe Clerc, expert en intelligence économique dans les CCI, indique par ailleurs qu'en matière de sécurité économique, la France peut mieux faire: "vu les stratégies prédatrices de certains pays émergents, comment nous protégeons-nous? La sécurité économique que nous utilisons est encore celle du siècle précédent".Le délégué interministériel à l'intelligence économique, Olivier Buquen, rappella pendant son allocution de clôture que la proposition de loi relative à la violation du secret des affaires est toujours sur les rails. Elle permettra d'estampiller les données sensibles "secret entreprise" et instaurera un délit de transgression du secret d'affaires.Avoir une vision plus prospectiveC'est ce sur quoi Philippe Clerc s'est arrêté: "Si toute cette intelligence ne sert pas une stratégie, elle est inefficace. Ce qui manque c'est de savoir où est la vision et quelle est la stratégie de long terme. Il faut un Etat stratège." De la même manière, Jean-François Phelizon ajoute que "la stratégie numérique ressort de la prospective: il ne suffit pas de prévoir l'avenir, il faut l'imaginer. Les entreprises devraient par exemple davantage investir dans le marketing numérique". 
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