Pourquoi Lactalis se rue sur Parmalat

Entremont, Puleva, Yoplait, Parmalat... Le français Lactalis a depuis deux ans un appétit d'ogre. Pas toujours satisfait. Entremont est finalement tombé dans le panier de la coopérative Sodiaal. Cette même coopérative vient de lui faire barrage sur Yoplait, confié finalement à l'américain General Mills. Mais avec le rachat de l'espagnol Puleva en mars 2010, Lactalis est devenu coleader (avec Danone) du marché des produits laitiers espagnols, où il réalise 1,12 milliard d'euros de chiffre d'affaires. Ne manquait plus pour lui qu'à consolider ses forces en Italie. Le groupe de Laval réalise des ventes de 1,8 milliard d'euros dans la péninsule grâce notamment au rachat du leader local du fromage, Galbani, en 2006. Il fait désormais une entrée remarquée dans Parmalat. Après une première prise de participation de 11,4 % la semaine dernière (suivie de 2,2 % supplémentaires ce lundi), Lactalis s'est arrogé, ce mardi, 29 % du capital en rachetant pour 744 millions d'euros les 15,3 % détenus par trois fonds étrangers et entend bien désormais peser sur les décisions à venir. « Nous sommes le premier actionnaire et nous ferons entendre notre voix », dit-on chez Lactalis. S'il se contente aujourd'hui de cette participation, le groupe ne cache pas son ambition de prendre, à terme, le contrôle de Parmalat. Ce qui impliquerait de lancer une OPA, un processus obligatoire par la loi italienne pour tout investisseur dépassant 30 % du capital. Une offensive qui inquiète politiques et industriels italiens., agacés de voir ses fleurons industriels passer sous pavillon français. Dans ce contexte, l'italien Ferrero a redit son intérêt pour reprendre Parmalat.À court terme, l'appétit de Lactalis lui permet de faire face à une distribution toujours plus contraignante. « La double crise, financière en 2009 et des matières premières, a affaibli les marges des marques de distributeur, ce qui rend ceux-ci de plus en plus exigeants avec les marques nationales », explique Francis Prêtre, analyste chez CM-CIC Securities. Tous les fabricants qui n'ont pas la taille critique sont hors jeu. Lactalis réalise 40 % de ses 9,4 milliards de chiffre d'affaires en France et deux tiers si l'on ajoute l'Espagne et l'Italie. Il est donc primordial pour lui d'être imbattable sur ces marchés.Marché atomiséÀ moyen terme, l'enjeu est de consolider un marché mondial des produits laitiers encore très atomisé. La volonté récente des chinois, comme Bright Foods, de prendre position en Europe prouve que la ruée est mondiale. « Il faut prendre toutes les places disponibles pour ne pas être marginalisé », commente Éric Mestre chez Accenture. En s'associant progressivement au destin de Parmalat, Lactalis s'offre de nombreuses synergies. Au niveau européen (l'Italie pèse 22 % des ventes de Parmalat), le groupe mayennais pourra poursuivre sa stratégie de valorisation du lait. En Espagne, Puleva, spécialiste des laits santé, réalise 14 % de marge, contre 6 % pour la filiale locale de Lactalis. Autant de brevets et de savoir-faire à dupliquer pour les laits de l'italien.Comme Yoplait (mais sans l'inconvénient des franchises), Parmalat offre aussi des débouchés à l'international : au Canada (37 % de ses ventes), en Australie (17 %), mais aussi au Brésil ou en Argentine. Depuis quatre ans, Lactalis a pris beaucoup de parts de marché en Amérique du Nord, Si son développement s'accélère grâce à Parmalat dans le reste du monde, Lactalis deviendra un géant incontournable, accédant au rang de numéro deux mondial des produits laitiers, dépassant Danone mais derrière Nestlé.
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