Un réformiste nommé Cranach

De lui, bien sûr, on connaît surtout les nus, images sublimées de la Bible ou des mythologies. Mais Lucas Cranach, fut également un portraitiste remarquable, jouant aussi bien d'un art de cour que de celui d'un témoin de son époque. En 75 oeuvres, gravures et tableaux, le musée du Luxembourg dresse un portrait tout en subtilité de cet artiste allemand du XVIe siècle. Peintre du protestantisme et de la Réforme, attaché à la cour de Saxe à Wittenberg, Cranach fut autant l'ami de Luther qu'admirateur de Dürer. Se laissant guider par son regard et ses voyages, il a su intégrer dans son oeuvre aussi bien la peinture italienne que flamande. Mais ce qui le caractérise c'est surtout son élégance, la vérité qu'il imprime à ses personnages et la place qu'il donne à la nature dans ses tableaux. Presque une allégorie. Mais allons tout de suite aux nus. Ses Adam et Ève. Ce qu'il crée d'emblée, c'est une nouvelle image idéalisée de la femme. Contrairement aux autres artistes de l'époque, elle est mince, élancée, aux courbes harmonieuses. En un mot désirable. L'audace de Cranach est de la montrer complètement nue, sans cacher le sexe, sauf pour Ève. Pour les sujets plus religieux comme les Vierges, le trait s'il conserve toute son élégance ne souligne pas les contours de la féminité, mais cherche à en laisser voir toute la volupté maternelle. Étrange. Le regard est souvent absent, détourné de l'Enfant Jésus.S'arrêtant aux portraits, on constate à quel point Cranach, s'attache à la vérité des personnages. Les princesses de Saxe offrent une gaîeté et un bonheur de vivre séducteur. Frédéric III laisse paraître dans un visage épais et las une certaine nonchalance, pour ne pas dire un ennui. Une autre jeune fille, au chapeau en boules emplumées, dévoile une ironie provocante. C'est à Cranach que l'on doit les portraits célèbres aujourd'hui de Luther. Toujours attentif à Dürer dont il emprunte certains thèmes, le peintre propose sa propre version de « la Mélancolie ». Portrait d'une jeune fille entourée d'objets symboliques, comme ces perdrix qui évoquent à l'époque la sexualité. Au-delà avec « le Martyr de Sainte-Catherine », Cranach donne toute la puissance de son imaginaire. L'amas de corps, d'armes, de chevaux, de plumets enserrant la martyre donne à la composition un côté fantastique qui rejoint une certaine abstraction. Au musée du Luxembourg jusqu'au 23 mai. Tél. : 01.40.13.62.00, www.museeduluxembourg.fr
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