Nouvelle polémique autour du nucléaire civil en Inde

L'Inde est-elle prête à brader la vie de ses citoyens pour protéger les industriels américains du nucléaire ? Le débat fait rage ici depuis quinze jours. Au point d'avoir obligé le gouvernement à retirer son projet de loi sur la responsabilité civile nucléaire.Voici dix-huit mois, l'Inde remportait un triomphe diplomatique en obtenant le feu vert de la communauté internationale pour ouvrir le pays au commerce nucléaire civil, bien qu'il n'a jamais signé le traité de non-prolifération. Mais aujourd'hui, la mise en oeuvre de ce programme se heurte à la question des responsabilités en cas d'accident. Alors que le pays est dépourvu de loi sur ce sujet, le gouvernement veut faire adopter un texte instituant un régime de responsabilité civile dans le nucléaire. Avec deux dispositions essentielles : l'opérateur des centrales (la firme publique NPCIL) est déclaré seul responsable, quelles que soient les circonstances de l'accident ; des plafonds d'indemnisation sont établis (80 millions d'euros à la charge de l'opérateur, 350 millions à la charge de l'état, à quoi s'ajoutent les versements du régime des états membres de la Convention internationale sur les compensations nucléaires). responsabilités à encadrerCe projet suscite d'innombrables critiques. Selon l'opposition et un grand nombre de journaux, le gouvernement veut laisser les fournisseurs étrangers d'équipement nucléaire dégager leur responsabilité. Et le régime légal mis en place ferait que, en cas d'accident, les victimes ne seraient pas mieux indemnisées que celles de l'accident chimique de Bhopal, il y a vingt-cinq ans. La mobilisation a été telle que le gouvernement a préféré retirer le texte.Pourtant, le projet de loi a le mérite de simplifier les procédures en évitant les procès sur la recherche des responsabilités, ce qui est à l'avantage des victimes, et n'interdit nullement à l'opérateur indien de se retourner contre ses fournisseurs en cas d'accident. Et le gouvernement pourrait débloquer la situation en relevant les plafonds d'indemnisation prévus. L'enjeu est de taille. L'Inde veut passer de 4.400 mégawatts installés aujourd'hui à 63.000 en 2032. La Russie a déjà deux réacteurs en construction et en négocie deux autres. La France, avec Areva, négocie deux EPR, les états-Unis n'ont pas encore entamé les discussions concrètes. Tous ces projets seraient compromis si l'Inde n'adoptait pas sa loi. « Il n'y a pas de commerce nucléaire sans régime de responsabilité », affirme un professionnel. « Tous les pays, états-Unis, Russie ou France, veulent une sécurité juridique » pour livrer des centrales, renchérit un Européen.
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