Gaz de schiste : débattre certes, mais débattre de quoi ?

Le débat sur l\'exploration et la production de gaz de schiste en France, qu\'appellent de leurs vœux Jean-Marc Ayrault et Arnaud Montebourg, se présente mal. Réticent à l\'idée de fermer la porte à une ressource dans le sous sol français qui pourrait représenter plusieurs dizaines d\'années de consommation nationale, le premier ministre et le ministre du redressement productif tentent de rouvrir le dossier en promettant d\'étudier les techniques alternatives à la fracturation hydraulique, interdite en France par la loi de juillet 2011.\"Pas d\'alternative aujourd\'hui\"« Il n\'existe pas aujourd\'hui d\'alternative à la fracturation hydraulique », déclare cependant à La Tribune Pascal Baylocq, du Groupement des entreprises pétrolières (GEP-AFTP). « Pour les cinq à dix ans à venir, il n\'y a pas d\'autres techniques disponibles pour produire du gaz de schiste », ajoute-t-il. Confirmant ainsi les propos de Pascal Durand, secrétaire national d\'Europe Ecologie-Les Verts (EELV). \"Il n\'y a pas actuellement, nulle part dans le monde, dans aucun labo de recherche, la capacité d\'aller fracturer (...) les minéraux pour aller chercher les gaz de schiste\" en dehors du procédé de fracturation hydraulique, a-t-il ainsi déclaré mercredi sur BFM.\"Mensonge éhonté\"\"C\'est un faux débat parce qu\'il y a une totale volonté de désinformation de la part d\'un certain nombre de groupes pétroliers qui essayent de faire croire qu\'on pourrait aller sur la prospection du gaz de schiste sans passer par la fracturation hydraulique, cela est un mensonge éhonté\", a poursuivi Pascal Durand. En fait, si écologistes et techniciens du pétrole sont d\'accord sur l\'absence d\'alternative actuelle à cette technique, ils en tirent des conclusions différentes. Pour Pascal Baylocq, dont l\'association professionnelle regroupe les entreprises techniques pétrolières, dont les foreurs, l\'absence d\'alternative avant dix ans n\'est pas incompatible avec une reprise de l\'exploration en France. « Dix ans, c\'est le temps qu\'il faudrait pour débuter la production d\'un champ, si on décidait maintenant de lancer les expérimentations autorisées par la loi de juillet 2011 », affirme-t-il. C\'était d\'ailleurs l\'argument avancé par Total dans son recours contre l\'abrogation de son permis d\'exploration. Le pétrolier français évoquait les perspectives de techniques à l\'étude comme la « fracturation électrique », qui consiste à créer des arcs électriques au fonds des puits, à 3 ou 4.000 mètres de profondeur, pour désagréger la roche. Egalement citée parfois : la « fracturation pneumatique » où l\'eau injectée pour fracturer est remplacée par de l\'air comprimé. « On teste aussi la substitution de l\'eau par du propane », souligne Pascal Baylocq avant de s\'avouer peu convaincu.La seule alternative : la fracturation hydraulique \"encadrée\"« Cela reste de la fracturation », observe-t-il. Pour lui, la seule bonne idée, c\'est le recours « encadré » à la fracturation hydraulique. « Il existe des risques, c\'est vrai. Mais ces risques peuvent être extrêmement contrôlés si on applique les normes de l\'industrie pétrolière. Ce qui n\'est pas toujours le cas aux Etats-Unis de la part des petits producteurs indépendants». Ainsi, affirme-t-il, tous les produits chimiques utilisés pour la fracturation, très polluants selon les écologistes, peuvent être remplacés par des produits utilisés dans l\'industrie agroalimentaire. « La grande peur porte sur le risque de propagation de la fracturation sur les nappes d\'eau. Mais d\'abord, 2 à 3.000 mètres séparent les deux zones. Ensuite, on peut contrôler cette propagation avec des techniques éprouvées », déclare-t-il. De même, selon Pascal Baylocq, les autres points décriés par les opposants, comme l\'utilisation intensive de l\'eau, la pollution sonore, l\'engorgement des routes par des camions.... peuvent être trouvés des parades, voire des solutions.Impossible d\'explorer sans cette technique, aujourd\'hui interditeAutoriser la fracturation hydraulique « encadrée » serait d\'autant plus nécessaire, selon lui, qu\'il admet qu\'il est peu raisonnable d\'explorer sans cette technique. « C\'est possible, mais jusqu\'à un certain point. On peut se faire une première idée sans fracturation hydraulique, mais cette technique est indispensable pour cerner la productivité du gisement », concède-t-il. Il va décidemment être difficile de faire reposer le débat promis sur le gaz de schiste sur les techniques alternatives. C\'est peut être pour construire une nouvelle ligne de résistance que la nouvelle ministre de l\'énergie Delphine Batho a lancé mercredi un nouvel argument contre l\'exploration et la production de gaz de schiste. « Je pense que la transition énergétique, ce n\'est pas d\'aller chercher de nouveaux hydrocarbures\", a-t-elle déclaré en s\'exprimant lors des journées d\'été d\'EELV à Poitiers.  
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