«Le modèle idéal» pour financer les infrastructures

Quelle est la principale spécificité de votre métier d\'investisseur dans les infrastructures ? Les infrastructures sont des actifs indispensables au bon fonctionnement des sociétés modernes. Ils sont aussi, de plus en plus, des supports d\'investissement à long terme. Par définition, le temps de maturation de nos projets est très long. Cela implique de consacrer plus de temps à les instruire que pour d\'autres classes d\'actifs. Nous avons par exemple remporté en 2010, avec notre partenaire industriel Vinci, un appel d\'offre pour la concession de la ligne LGV Tours-Bordeaux pour une durée de 50 ans, alors que les premières études menées par l\'Etat pour cette ligne remontaient au début des années 1990! Nous passons ensuite beaucoup de temps à gérer nos participations, en suivant tout particulièrement les problématiques de financement, notamment la gestion dans le temps de la dette bancaire et obligataire, ainsi que l\'optimisation de la performance opérationnelle..Y\'a-t-il un attrait particulier pour ce type d\'actifs? L\'appétit des investisseurs pour les infrastructures est en forte croissance. Car ce sont des actifs à la fois sécurisés et qui offrent un meilleur rendement que les obligations d\'Etat par exemple, surtout dans la période actuelle de taux historiquement bas. Cet appétit croissant est particulièrement visible sur le marché des actifs matures, dont le modèle économique est robuste (autoroutes, réseaux de transport et de distribution d\'énergie, aéroports, ports,...).En outre, les investissements dans les infrastructures sont décorrélés des fluctuations économiques et financières. Leur rendement courant annuel peut être de l\'ordre de 5%, et on peut espérer des taux de rentabilité interne supérieurs à 10%.Votre métier semble pourtant être en plein changement... Oui, notamment en matière de financement. Les infrastructures présentent en effet un niveau de risque relativement faible. Sur ces actifs, il est donc recommandé de privilégier un financement par emprunt, dont le coût est très inférieur à celui des fonds propres. Or aujourd\'hui, en raison du durcissement de la réglementation prudentielle pesant sur les banques, celles-ci se retirent des financements à long terme, notamment en matière d\'infrastructures. Les acteurs du marché des infrastructures réfléchissent donc à des solutions alternatives, à dominante obligataire, reposant davantage sur des financements de marché. L\'Union européenne a également décidé de stimuler le développement des infrastructures à travers la création de «Project bonds» ou «Obligations de projets», dont l\'objectif est de pallier la déficience de financements bancaires pour des projets d\'infrastructures essentiels en Europe. Une solution qui repose sur l\'intervention de la Banque européenne d\'investissement (BEI).La culture européenne est pourtant peu portée sur le financement obligataire... En Europe, le financement en dette de projets d\'infrastructures se faisait majoritairement par financement bancaire et très peu par financement obligataire. Il faut donc habituer les acteurs à un nouveau modèle. C\'est un défi car il faut convaincre les investisseurs obligataires de prêter de l\'argent à une société de projet pour un actif qui n\'est même pas encore construit. Difficile aujourd\'hui de l\'expliquer à un marché où les investisseurs demandent que les obligations émises soient notées à un niveau incompatible avec de telles conditions. Le modèle idéal pourrait être un modèle mixte dette bancaire/ dette obligataire.Car il est possible de financer pendant la période de construction par de la dette bancaire. Puis une fois l\'ouvrage mis en service, de refinancer cette dette bancaire par de la dette obligataire. La contrepartie à cela est que le risque de refinancement repose sur la société qui porte le projet, c\'est-à-dire in fine sur les actionnaires qui ont engagé leurs fonds propres. Les exigences de rendement des investisseurs pourraient en conséquence augmenter.Quels sont les investisseurs en fonds propres qui viennent dans les infrastructures ? Les investisseurs en fonds propres dans les infrastructures sont principalement des investisseurs institutionnels tels que les compagnies d\'assurance vie, les fonds de pensions ou plus récemment certains fonds souverains. Ils souhaitent diversifier leur allocation d\'actifs, dans laquelle les infrastructures prennent une place de plus en plus grande. Ce type d\'actifs est conforme à ce qu\'ils attendent en termes d\'équilibre rendement/risque et de maturité. Par exemple, les fonds de pension versent des pensions 20 ou 30 ans après la souscription. Investir dans les infrastructures leur permet du coup de caler l\'horizon de leur actif sur celui de leur passif. Nous souhaitons développer les partenariats avec ces investisseurs de long terme pour contribuer au financement des infrastructures en France.   CDC Infrastructure est une filiale de la Caisse des dépôts qui a vocation à investir dans les infrastructures. Elle dispose pour cela d\'une enveloppe de 1,5 milliard d\'euros depuis 2010 sur laquelle elle a déjà consommé près d\'un milliard d\'euros. Cet investisseur financier public de long terme a pour l\'instant réalisé une quinzaine d\'investissements dans les secteurs du transport, de l\'énergie, des télécoms, des technologies et de l\'environnement.  
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