« La rue du Bon Augure est un fantasme, une sensation, c'est un port flottant sans entraves, c'est une grande liberté, [...] un grand chaos, une longue nuit où l'on peut rêver les yeux grands ouverts. C'est ?le show de la vie? que tout le monde joue sans s'être concerté. » Dans cette rue chinoise du centre de l'empire du Milieu vit Célébrité, vendeuse de cous de canards sur le marché nocturne.Célébrité est une femme de tête, le pilier d'une famille pas franchement sympathique et vivant à ses crochets. « Célé » est aussi une femme implacable, prête à beaucoup de choses pour parvenir à ses fins. Dans la rue du Bon Augure, il ne fait pas bon se mettre Célébrité à dos, surtout lorsqu'elle se met en tête de récupérer une partie de la maison familiale... Chi Li, auteure chinoise, dresse à travers « le Show de la vie » des portraits acides, acérés et sans concession d'une classe populaire provinciale embourbée dans les lenteurs administratives et pourtant championne de la débrouille. Celle qu'on qualifie de « chef de file du courant néoréaliste chinois », s'il faut lui adjoindre une étiquette, n'est jamais aussi brillante que lorsqu'elle use de cette ironie mordante et de l'humour noir qui désamorçaient déjà les passages difficiles de ses romans antérieurs, comme « Trouée dans les nuages » et « Triste Vie ».Dans « le Show de la vie », les femmes tiennent le haut du pavé, tandis que les hommes apparaissent vils, lâches, profiteurs ou simplement passifs. A contrario, leurs épouses, soeurs et voisines sont redoutables d'énergie, travailleuses et obstinées. Mais plus qu'un roman familial, l'ouvrage est aussi et surtout un instantané sociologique.Grâce à une écriture imagée, un style fluide et un grand pouvoir d'évocation, Chi Li nous emmène dans les méandres d'une société chinoise en plein bouleversement, entre nostalgie du communisme et engouement pour l'économie de marché. « Le Show de la vie » de Chi Li, Actes Sud, 18 euros.

latribune.fr

24 Jan 2011, 23:28

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