« Le discours du FN correspond au quotidien des classes populaires »

STRONG>Alain Mergier*, sociologue et dirigeant de l'Institut WEILa percée du FN au premier tour des cantonales met-elle en relief la France des classes populaires ?Ce vote donne à voir qu'une partie de la population - les classes populaires - se considère exclue du champ et du discours politique classique. En 2007, elles avaient été l'objet d'un discours de la part de Nicolas Sarkozy et de Ségolène Royal, qui étaient d'une certaine manière sur le même registre. Elles ont voté pour eux et on a assisté, provisoirement, à une disparition du FN. Mais ensuite les ouvriers, les employés et ce qu'on appelle le « nouveau prolétariat des services » ont été déçus. Ils ont vécu la situation comme une trahison, qui dépasse le camp de la majorité et ne profite pas à la gauche.Le vote FN n'est-il qu'un vote de contestation ?Pas à 100 % car il y a une partie du vote qui est positif vis-à-vis de Marine Le Pen. Son discours correspond au quotidien des classes populaires. Elle parle d'insécurité, un thème qui va au-delà des problèmes de violences. Il renvoie à la question de la mondialisation, avec ses flux migratoires, ses délocalisations qui créent du chômage, etc. Les gens se sentent vulnérables à tous les niveaux : le travail, le pouvoir d'achat, la sécurité, etc.La situation a-t-elle évolué par rapport à 2006 ?Elle est différente, essentiellement à cause de la crise, qui a mis en évidence des différences entre la France oligarchique et le monde des classes populaires. La distinction entre les deux s'est accentuée de manière outrancière, obscène. Elle a réellement pris forme en 2010 quand les Français se sont rendu compte que les salaires des grands patrons et les résultats des entreprises étaient repartis à la hausse, alors qu'eux s'enfonçaient. Les scandales mêlant les politiques et le monde économique et le fait que l'exécutif ait partie liée avec cette oligarchie ont renforcé les classes populaires dans leur sentiment que celui pour qui elles ont, en partie, voté était « dans l'autre camp ». Avec la hausse des prix, la situation s'est durcie et le sentiment d'injustice s'est accru. Les classes populaires sont touchées au portefeuille et n'ont plus de marge de manoeuvre. Pour elles, la crise c'est maintenant. (*) Auteur avec Philippe Guibert en 2006 de l'ouvrage « le Descenseur social », chez Plon.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.