Dalkia se risque dans le Grand Nord russe

 La société privée russe MejRegionSoyouzEnergo (MRSE) finalise un accord avec Dalkia offrant à la société française la gestion d\'un réseau d\'actifs des systèmes de chaleur et de chauffage urbain. MRSE a déjà engagé environ 150 millions d\'euros dans le projet et envisage des investissements s\'élevant à 1,2 milliards d\'euros dans une seconde étape. « Dalkia souhaite avoir un rôle d\'opérateur dans ce projet, mais n\'exclue pas de devenir investisseur plus tard », explique Oleg Syabrenko, directeur pour le développement en Russie chez Dalkia. « Nous cherchons à transmettre le savoir-faire développé par Dalkia en Europe de l\'Est et dans les pays baltes, où Dalkia a été à la fois opérateur et investisseur ». En Russie comme dans d\'autres pays d\'Europe de l\'Est, le chauffage urbain est fourni à la population par des centrales thermiques chauffant des canalisations d\'eau reliées à tous les logements urbains. Cette infrastructure date de l\'époque communiste et nécessite une profonde modernisation car l\'efficacité énergétique est très faible. Qui plus est, la population ne paie pas ce service, ou bien à des tarifs très inférieurs au marché.Financés sans argent publicIouri Choulguine et Eldar Osmanov, les deux investisseurs contrôlant MRSE, détaillent à La Tribune le caractère inédit de leur entreprise. « Tous nos projets sont entièrement financés sans argent public », explique Osmanov. « Quand l\'Etat donne de l\'argent, cela s\'accompagne d\'un tas de paperasserie et de contrôles ». Choulguine renchérit : « notre schéma de travail exclut les risques liés à la corruption : nous faisons l\'interface avec les autorités et les investisseurs privés sont protégés des tracasseries administratives ». Pour dégager des profits, « pas besoin de réclamer une hausse des tarifs [qui est d\'ailleurs gelé sur les cinq prochaines années]», assure Choulguine, « les marges sont obtenues en baissant les coûts de fonctionnement grâce à l\'implémentation de nouvelles technologies, de production à partir d\'énergies renouvelables [éolienne] et de biocarburants ». Il table sur un retour sur investissement au bout de cinq ans, pour un projet découpé en plusieurs tranches et s\'étalant sur quinze ans.Sur le papier, le projet est séduisant. Le gaspis d\'énergie par les collectivités locales est phénoménal en Russie. Les sociétés françaises spécialisées (Fenice, GDF Suez, Schneider Electric, etc.) prospectent activement sur ce marché et quelques projets pilotes ont déjà démarré avec des sociétés russes. Le hic, c\'est que le secteur des services aux collectivités locales (JKKh en russe) est l\'un des plus opaques et risqués du pays, à cause de la forte corruption et d\'une législation à la fois obsolète et changeante.Un partenaire à la réputation sulfureuseL\'un des principaux défis pour Dalkia consiste à trouver un partenaire fiable. Or, la réputation des deux hommes d\'affaires derrière MRSE a été récemment mise à mal. Leur autre société commune, RosCommunEnergo (négoce d\'électricité), a été accusée par le quotidien Vedomosti de racheter des entreprises pour les vider de toutes leurs liquidités, de ne pas payer leurs dettes, le tout en totale impunité. Selon le même quotidien, une ancienne directrice de RosCommunEnergo, Tatiana Romanova, a porté plainte contre ses anciens patrons pour menaces après qu\'elle ait dénoncée à la police leurs méthodes. MRSE a donc grand besoin de se refaire une image. Trouver un partenaire étranger fait partie des meilleures stratégies pour une société russe. Reste à savoir si pour Dalkia le jeu en vaut la chandelle.
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