Jean-Pierre Jouyet fait chanter les politiques

Le président de l'Autorité des marchés financiers a décidé de faire mentir l'adage selon lequel « en France, tout finit par des chansons ». Pour Jean-Pierre Jouyet, tout se vit plutôt en chantant. « Bercé dans la ?Douce France? de Charles Trenet, réveillé après 1968 par ?Ma France? de Jean Ferrat, j'ai toujours été frappé par la concordance - ou parfois la dissonance - entre ce que le pays ressentait socialement, politiquement, et ce que les chansons exprimaient », écrit-il en ouverture d'un opus original, qui mêle références musicales et souvenirs politiques dans un récit qui court sur trente années.À l'ENA, Jean-Pierre Jouyet a rencontré François Hollande, Ségolène Royal et Dominique de Villepin dans la fameuse promotion Voltaire, que Gavroche chantait, tiens donc, sur la barricade des « Misérables ». Puis, tandis que ses amis partaient en politique, il a choisi l'administration. En 2007, il a franchi imprudemment la frontière gauche-droite en occupant - de manière éphémère - un poste de secrétaire d'État aux Affaires européennes auprès de Nicolas Sarkozy. Une Europe qu'il chante au son de « Stone, le monde est stone », la chanson phare de Starmania, l'opéra rock de Michel Berger et Luc Plamondon.Les années de jeunesse ont la saveur nostalgique d'un film de Claude Sautet, entre les rêves et les espoirs de la gauche arrivant au pouvoir et les vacances d'été au rythme des tubes de Julien Clerc, France Gall et Michel Berger. Le récit des années Delors, dont il a été directeur de cabinet à Bruxelles, jusqu'à la déception de la non-candidature à la présidentielle de 1995, a le goût d'un roman d'initiation. Le passage en sarkozysme est relaté avec humour, avec des scènes surréalistes où le chef de l'État et ses ministres entonnent en avion des chansons d'Aznavour. Au passage, on apprend que Ségolène Royal chante souvent, que Dominique Strauss-Kahn ne maîtrise pas très bien la discipline, que François Hollande écoute Léo Ferré en secret et que Carla Bruni-Sarkozy a évidemment chamboulé la discothèque de son mari.Le livre se clôt sur un double hit-parade des politiques et des chanteurs, par ordre alphabétique car Jean-Pierre Jouyet est diplomate. « Que reste-t-il de nos amours ? » lance-t-il à Nicolas Sarkozy, en qui il voit « la personnalité politique la plus singulière, avec François Mitterrand, de ces cinquante dernières années ». Jean-Pierre Jouyet regrette aussi chez François Hollande un tempérament de « solitaire », qu'il l'engage à combattre, et note chez Dominique Strauss-Kahn « le charme... et la distance par rapport à lui-même » qui est « sa force et sa faiblesse ». Hélène Fontanaud « Nous les avons tant aimés ou la chanson d'une génération », de Jean-Pierre Jouyet. Éditions Robert Laffont (280 pages, 20 euros).
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