Pourquoi la France s'est désindustrialisée ?

Selon la récente note de conjoncture produite par l’Insee,www.insee.fr/fr/indicateurs/analys_conj/archives/122012_d1.pdf, plusieurs facteurs expliquent le recul structurel du secteur industriel dans l’économie, la fameuse désindustrialisation dont les conséquences sont actuellement symbolisées par PSA Aulnay ou Florange entre autres.Des dossiers industriels délicats qui viennent s\'ajouter à de nombreux cas de fermetures d\'usines. Plus de deux millions d’emplois détruits en trente ansEn France, l’emploi manufacturier est passé de 5,1 millions en 1980 à un peu moins de 2,9 millions aujourd’hui. Parallèlement, la part de l’industrie manufacturière dans la valeur ajoutée s’est réduite de 20,6 % à 10%.Les deux facteurs cités sont l’effet revenu et les gains de productivité sectoriels. Petit rappel, lorsque les variations de la consommation s’expliquent par les variations du revenu, on parle d’effet revenu. « Or de nombreux résultats suggèrent que les élasticités-revenu de la demande de biens industriels en France sont inférieures à l’unité, une augmentation du revenu tendant à avoir un effet plus important sur la consommation de services que sur la consommation de biens, ce qui crée une divergence entre la demande de biens et la demande de services », explique l’Insee.La faute aux gains de productivitéL’économie dans son ensemble ayant connu des gains de productivité importants pendant la période 1980 – 2007, les revenus ont donc globalement progressé et, ainsi, l’industrie manufacturière a eu une tendance structurelle à stagner. Sans surprise, la mondialisation a eu également un impact sur l’emploi manufacturier, même si ceux-ci ne sont pas si évidents à appréhender. Les débouchés des entreprises industrielles françaises ont certes augmenté mais en contrepartie, celles-ci ont vu la concurrence s’accroître sur le marché mondial des biens, notamment de la part de pays émergents, pesant ainsi sur leur compétitivité-prix à l’exportation comme sur le marché intérieur. Via une approche comptable, l’étude de l’économiste Lilas Demmou intitulée « Le recul de l’emploi industriel en France entre 1980 et 2007 - Ampleur et principaux déterminants : un état des lieux » parue dans Économie et Statistique évalue le poids de la mondialisation dans les pertes d’emploi industriel à 13 % entre 1980 et 2007. Cette contribution atteindrait 28 % sur la période récente (2007-2011).Deux autres facteurs explicatifs A ces deux facteurs s’ajoutent deux phénomènes majeurs qui expliquent la baisse comptable du poids de l’industrie dans le calcul de la valeur ajoutée totale en France depuis trente ans : l’externalisation et l’intérim. « Ces phénomènes contribuent à réduire artificiellement les valeurs ajoutées et l’emploi manufacturier, pouvant ainsi amplifier l’impression de désindustrialisation observée, et doivent être pris en compte », explique l’Institut qui rappelle qu’à partir des années 80, l’industrie manufacturière a en effet commencé à externaliser au sein même du territoire français.En effet , de nombreux services, auparavant regroupés dans une même entreprise et à ce titre considérés comme constituant de la valeur ajoutée industrielle, ont été sous-traités à des entreprises de services. Les emplois ainsi externalisés ont régulièrement progressé depuis trente ans. Selon les calculs de l’Insee, ils représentaient 25 % de l’emploi industriel en 2007 contre 9 % en 1980 ».L’intérim, la flexibilité du marché du travail à la françaiseDans le même temps, pour flexibiliser son outil de production face aux aléas répétés de la conjoncture, l’industrie manufacturière fait largement appel à l’intérim, même pour des tâches directement liées à la production. Résultat, l’emploi intérimaire s’est beaucoup accru pendant les années 90, le nombre d’intérimaires augmentant de 257. 000 en 1990 à 626.000 en 2000. Le taux de recours à l’intérim dans le secteur manufacturier s’est ensuite stabilisé autour de 8 % en moyenne durant les années 2000.« Or, en comptabilité nationale, les intérimaires, salariés des entreprises de travail temporaires, sont affectés à la branche correspondante. Le service de travail temporaire acheté par la branche utilisatrice figure en consommation intermédiaire de celle-ci et participe à la valeur ajoutée des entreprises de travail temporaire. Ainsi, la valeur ajoutée et l’emploi manufacturier tendent à décroître du fait du recours accru à l’intérim, au profit des services », précise l’Insee. CQFD.Lilas Demmou estime à 25 % environ la contribution de ce phénomène aux pertes d’emploi industriel sur la période 1980-2007. « Dans la période récente, entre 2000 et 2007, ce phénomène a ralenti, notamment parce que les entreprises commencent à arriver au terme de leur processus d’externalisation, et l’externalisation ne représenterait plus sur la période que 5 % de la perte d’emploi industriel », complète l’Insee. 
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