Compétitivité : il n'y a pas que le coût du travail

Doit-on attendre un miracle, un gain de compétitivité immédiat pour l\'économie française, d\'une réforme du financement de la protection sociale ? Autrement dit, pour parler clair, d\'une baisse des charges sociales ? Jean-Marc Ayrault, qui a installé ce mercredi le haut Conseil du financement de la protection sociale a donné à celui-ci des délais assez courts -trois mois- pour présenter des scénarios de réforme au gouvernement. Celui-ci s\'en inspirera pour revoir le financement de la protection sociale,  début 2013. Ce conseil, présidé par l\'économiste Mireille Elbaum, devra intégrer les conclusions du commissaire à l\'investissement, Louis Gallois, dont le rapport devrait être, lui, remis début octobre. On sait que l\'ex président d\'EADS a préconisé, début juillet, un transfert massif des cotisations sociales patronales sur la CSG, afin de diminuer sensiblement le coût du travail.Une piste qui soulève beaucoup de questions : peut-on augmenter fortement la CSG en amputant donc le pouvoir d\'achat des salariés, alors que la demande est atone ? Ou alors, s\'agit-il de cibler la hausse de CSG sur les retraités ? Mais ceux-ci seraient surtout appelés à financer la dépendance.En outre, il y a débat sur le rôle du coût du travail dans la baisse relative de la compétitivité industrielle, en France. Le coût horaire moyen dans l\'industrie est sensiblement le même en France et en Allemagne (33 euros de l\'heure). S\'agissant des bas salaires, le coût du travail est clairement plus faible en France, comme l\'a montré une récente étude de la direction générale du Trésor, à Bercy. Le poids global des charges sociales est inférieur en France jusqu\'à 1700 euros de salaire brut mensuel. Et l\'impôt sur le revenu apparaît plus lourd en Allemagne, ce qui conduit les employeurs à accorder un niveau de salaire supérieur. Une industrie française pas assez haut de gammeIl n\'existe donc pas de handicap a priori. Sauf que, soulignent certains économistes, comme Gilbert Cette, qui, avec son collègue Philippe Aghion, préconise un véritable « choc d\'offre », l\'industrie française est centrée sur des produits d\'une gamme inférieure, en comparaison avec son homologue allemande. Des produits de gamme moyenne, sur lesquels elle n\'est plus en mesure, aujourd\'hui, d\'être compétitive, compte tenu des prix qu\'impose le marché international. Bien sûr, l\'idéal serait de se tourner vers des activités à plus haute valeur ajoutée... mais cela prendra beaucoup de temps. D\'où l\'idée d\'un nouveau financement de la protection sociale, moins centré sur les charges patronales. « Nous devons traiter les sujets de la compétitivité-coût des entreprises françaises et des modalités de financement de la protection sociale » a souligné Jean-Marc Ayrault.  Toutefois, compte tenu des marges de manœuvre plutôt faibles, pour redéployer ce financement, le choc d\'offre risque d\'être bien insuffisant.Des facteurs micro-économiques freinent la compétitivitéEn outre, la compétitivité ne résume pas à des considérations macro-économiques de coût du travail. Des facteurs micro-économiques jouent un rôle considérable. Une étude récente du think tank bruxellois Bruegel montre à quel point la taille de l\'entreprise peut influer sur sa performance. L\'Italie et l\'Espagne, mais aussi la France, souffrent de la trop petite taille de leurs entreprises, souligne l\'étude. La taille influe sur la capacité à innover et à exporter, les deux étant liés. Les auteurs de l\'étude valident donc le thème récurrent du manque de grosses PME en France, surtout en comparaison avec l\'Allemagne.Ils ne mentionnent pas un facteur culturel, semble-t-il déterminant, qui n\'a pas encore fait l\'objet d\'études précises : l\'attachement des patrons allemands à leur entreprise fait contraste avec une culture française beaucoup plus « court-termiste ». Outre-Rhin, le seul objectif est de développer la PME familiale, dont on n\'imagine pas qu\'elle puisse être vendue. En France, nombre de chefs d\'entreprise, une fois celle-ci correctement valorisée, ne songent qu\'à la céder au plus offrant. Elle se trouve ensuite, très souvent, dépecée, alors que son potentiel de croissance était bien réél. Cela expliquerait pourquoi seules 7,9% des entreprises françaises comptent plus de 250 employés, contre 10,7% en Allemagne. S\'agissant des entreprises de 50 à 249 salariés, 27,3% des firmes allemandes se situent dans cette tranche, contre seulement 21,1% des françaises. Ces dernières comptent donc, beaucoup plus souvent, moins de moins 50 salariés.
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