Goutseriev  : le mystérieux retour d'un oligarque exilé à Londres

Tout pétri de modernité et de transparence, le jeune président Dmitri Medvedev marque chacun de ses discours de critiques contre la corruption et les structures administratives qui font d'après lui « cauchemarder » le business. Mais l'itinéraire rocambolesque de l'oligarque Mikhaïl Goutseriev et son retour probable dans le monde du pétrole russe montrent combien les vieilles habitudes refusent de se perdre.D'origine ingouche, l'homme aujourd'hui âgé de 51 ans s'est d'abord intéressé à la banque, puis à la politique. Il fonde en 2002, dans des conditions assez mystérieuses, le groupe pétrolier Russneft (à ne pas confondre avec le numéro un du pétrole russe, Rosneft). C'est le seul groupe privé à mener une politique d'acquisition extrêmement agressive alors que le Kremlin remet la main sur des pans entiers de l'industrie russe. Personne ne sait non plus où il a trouvé l'appui financier nécessaire à sa politique d'acquisition, en dehors du trader suisse Glencore. La croissance fabuleuse de Russneft (300.000 barils de brut par jour en 2007) fait alors dire que Mikhaïl Goutseriev bénéficie d'une « protection » au plus haut niveau.Tout bascule en 2007. Mikhaïl Goutseriev se voit brusquement accuser de mener des activités illégales à grande échelle et de frauder le fisc. Le fils aîné du milliardaire périt dans des circonstances mystérieuses. Cette année-là, le quotidien « Vedomosti » lui décerne le titre d'« énigme de l'année ». L'oligarque fuit à Londres tandis que Moscou émet un mandat de recherche international.Parallèlement, l'oligarque favori du Kremlin, Oleg Deripaska, fait une offre de 3 milliards de dollars à Mikhaïl Goutseriev pour Russneft. La somme est versée, mais les autorités russes ne valident pas la transaction. Résultat, Russneft opère dans les limbes. Aujourd'hui surendetté, Oleg Deripaska ne fait plus l'affaire des autorités et nul ne sait qui est le bénéficiaire de ce groupe trônant sur des réserves de 600 millions de tonnes de pétrole. En 2008, Russneft a extrait 14,2 millions de tonnes de brut pour un chiffre d'affaires de 2,7 milliards d'euros et 200 millions d'euros de bénéfice net.Nouveau rebondissement, la semaine dernière, lorsque Mikhaïl Goutseriev est retiré sans explication de la liste d'Interpol. Son nom est même évoqué pour un poste de responsable du Nord-Caucase. Russneft lui serait rendu en contrepartie. Et les tractations byzantines débouchant sur d'extravagants transferts de propriété se poursuivent comme au pire des années 1990. Emmanuel Grynsz
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