L'Amérique désillusionnée de Duane Hanson

Même s'il s'en défendait, Duane Hanson est souvent identifié comme artiste hyperréaliste, ce mouvement, né dans les années 1960 et dérivé du pop art, qui s'attache à décliner une réalité quotidienne dans ses plus profonds détails. Le sculpteur se revendiquait pour sa part plus volontiers expressionniste. L'un n'empêche finalement pas l'autre. Il est difficile de nier que le premier aspect frappant de ses sculptures est leur réalisme troublant. On aimerait pouvoir les pincer pour se convaincre qu'elles ne sont pas faites de chair et d'os. Mais une fois cet effet dissipé, c'est l'intensité expressive qui nous chavire. Ces hommes et femmes ordinaires de modeste condition nous parlent, nous renvoient à nous-mêmes. Leurs regards et mimiques expriment douleur ou ennui, colère ou tristesse. Émotions complexes et déstabilisantes. Né en 1925 dans le Minnesota, au coeur d'une petite ville de l'Amérique profonde, Parkers Prairie. Duane Hanson s'intéresse très tôt à la sculpture. à 13 ans il édifie une réplique réaliste en bois de « The Blue Boy » de Thomas Gainsborough. C'est en quelque sorte le début de son travail sur la représentation de la condition humaine. Après des études aux Beaux-Arts, il enseigne tout en produisant des oeuvres dont il n'est guère satisfait.Un tournant s'opère dans les années 1960 avec la découverte de nouveaux matériaux (la résine synthétique et la fibre de verre) dont le réalisme qu'ils permettent l'intéresse particulièrement. Les premières sculptures qui lui valent une certaine notoriété s'inscrivent dans l'agitation des grands mouvements sociaux de l'époque. Il y parle d'avortement, de guerre, de racisme. Mais à partir des années 1970, Duane Hanson se détache des thèmes trop explicites. À l'instar d'un Raymond Carver en littérature, il se prend d'amour pour les gens ordinaires, ces « héros du quotidien » comme il aimait les appeler. Ouvriers, femmes de ménage, retraités... Tous sont moulés sur des corps humains, puis travaillés méticuleusement, jusqu'à obtenir une copie dont l'âme même aurait été conservée.Décédé en 1996 des suites d'un cancer, Duane Hanson aura laissé derrière lui 144 sculptures. Depuis 2003, la présence de ses oeuvres sur le marché s'est accentuée. Il fallait alors compter entre 100.000 et 300.000 euros pour en acquérir une. Mais depuis, la cote de l'artiste a encore monté. Présentée l'année passée à la galerie Perrotin, « High School Student » affichait un prix de 335.000 euros. À la Fiac 2007, la galerie new-yorkaise Van de Weghe Fine Art laissait quant à elle partir « The Photographer » à 550.000 euros. Olivier Le Floc'h
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