« Avec la réforme du lycée, les élèves auront droit à l'erreur »

Que va vraiment changer à la rentrée la réforme du lycée pour la classe de seconde ?Beaucoup de choses, sans pour autant que les horaires soient alourdis, et c'est là un objectif fondamental. Le premier grand changement, c'est la personnalisation de l'enseignement que nous allons mettre place avec les deux heures d'accompagnement personnalisé. Cet axe majeur de la réforme entend répondre au grand défi actuel posé à l'Education nationale : s'adapter à la diversité des élèves. Pendant ces deux heures d'accompagnement personnalisé, les élèves seront pris en charge par petits groupes : ceux en difficulté pour du soutien scolaire ; ceux qui ont des facilités pour les pousser vers l'excellence, ceux enfin qui ont besoin de conseils pour envisager leur orientation. Le deuxième changement concerne le processus d'orientation. Les élèves qui le demandent et dont les familles ne maîtrisent éventuellement pas bien le système éducatif, vont bénéficier d'un tutorat. Il sera assuré par des enseignants, rémunérés pour cela, qui pourront ainsi accompagner les élèves tout au long de l'année pour les aider à s'orienter. La troisième nouveauté, c'est l'économie pour tous : tous les élèves de seconde vont suivre un enseignement d'économie qui était jusqu'à présent facultatif. Cette initiation aux fondamentaux de l'économie constitue une réelle avancée pour la compréhension du monde. Nous avons également mis en place des enseignements d'exploration dont l'objectif est d'intéresser les élèves aux différentes séries et spécialités. L'objectif est d'éveiller les élèves, d'aiguiser leur esprit critique. Autre élément, la culture. Il y aura dans chaque lycée un enseignant qui sera un référent en la matière, qui sera chargera d'animer la vie culturelle dans le lycée. Il pourra par exemple mettre en place le ciné club avec CinéLycée que j'ai lancé il y a un mois.Enfin, l'enseignement des langues se fera par groupes de compétences. On le sait, c'est un plus pour acquérir les notions linguistiques.En l'état actuel des remontées du terrain que vous avez, pensez-vous que les lycées soient prêts pour la rentrée ?Oui. J'ai mobilisé très tôt nos personnels d'encadrement. Dès que la réforme a été présentée, j'ai fait un tour de France des académies, organisé des réunions inter académiques, en novembre, j'avais rencontré tous les proviseurs et même des principaux de collèges pour qu'ils préparent leurs élèves à l'entrée en seconde. La réforme est aussi à l'ordre du jour de chaque réunion de recteur. Et d'après les retours des académies que j'ai reçus sur les préparatifs, tout est prêt. Par ailleurs, le numéro spécial consacré à la réforme de la brochure Onisep que nous avons édité en avril a été téléchargé en quelques jours à 1 million d'exemplaires. C'est la preuve qu'il y avait une forte demande d'information : nous y avons répondu.Certaines critiques reprochent à cette réforme de ne pas avoir assez rééquilibré les filières et d'avoir maintenu le monopole de la série S...Je récuse. Nous rendons plus attractive la filière littéraire (L) avec les enseignements en « littérature et société », en « Droit et enjeux du monde contemporain » et la spécialisation en langues (littérature en langue étrangère). L'objectif est d'augmenter les débouchés. Quant à la filière S, elle bénéficie de deux aménagements importants : un enseignement autour de l'informatique en terminale et l'épreuve d'histoire anticipée en première. Ce changement a fait couler beaucoup d'encre alors que les élèves de cette série préfèrent justement répartir la charge des examens entre les deux années afin de mieux se consacrer aux matières scientifiques à gros coefficient en classe de terminale. Que vous inspirent toutes les polémiques sur les nouveaux programmes du lycée ?Dans cette maison, tout changement fait débat. Je pense avoir montré - et à cet égard l'exemple de l'enseignement de l'économie est un bon exemple - que j'avais tenu compte des positions des uns et des autres. La méthode consistant à installer des groupes d'expert sur les programmes, qui ont travaillé avec l'inspection générale et fait des propositions, puis à organiser une période de consultation publique où les professeurs ont pu donner leur avis avant l'arbitrage final me semble la bonne.Dans quelle mesure la réforme du lycée va-t-elle réellement lutter contre les inégalités en matière d'orientation ?Nous allons en premier lieu améliorer l'information avec les nouvelles plates-formes multimédia de l'Onisep. Cet outil permet un accès sans précédent à l'information avec une personnalisation de l'accompagnement, la géolocalisation des formations et des débouchés disponibles dans votre département. Le tutorat prévu par la réforme va aussi permettre de gommer les inégalités en matière d'information avec, par exemple, l'organisation de visites d'université, d'entreprises ou la présentation par d'anciens élèves ou des parents de leur parcours professionnel. Enfin, possibilité sera donnée aux élèves de changer de filière (lycées technologique, professionnel...) ou de série en cours ou en fin de première. Aujourd'hui, l'orientation est trop souvent subie et vécue comme un couperet. L'idée est donc que les élèves ont le droit de se tromper ou de changer. L'objectif est qu'ils puissent mieux construire leur projet.Comment va-t-elle mieux préparer aux études supérieures ?Tout d'abord en faisant en sorte que moins d'élèves décrochent du lycée. Je rappelle que 120.000 jeunes quittent chaque année le système éducatif (50.000 quittent le lycée) sans diplôme. Ensuite en leur permettant de trouver plus facilement leur voie d'orientation. Pourquoi un étudiant sur deux échoue-t-il en fin de 1ère année ? Souvent parce qu'il n'a pas trouvé sa voie. Si l'on sensibilise plus les élèves dès la seconde, ils auront plus de chance de s'accomplir dans une filière universitaire. Ensuite, l'accompagnement personnalisé vise aussi à leur transmettre des méthodes de travail (prise de notes, organisation....) alors que certains sont très déboussolés par la première année en université.Des syndicats d'enseignants estiment que la réforme du lycée est avant tout un moyen de supprimer des postes (16.000 suppressions prévues en 2010 et en 2011). Que leur répondez-vous ?Je réponds tout d'abord que le président de la République lui-même, quand il a présenté la réforme, a été clair : cette réforme se fera à taux d'encadrement constant. Cette réforme est aussi le fruit d'une concertation avec les fédérations de parents d'élèves, des représentants de fédérations de personnels d'encadrement et de syndicats. Il ne faut pas l'oublier.
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