L'auto française va mieux, les usines moins

Les constructeurs automobiles tricolores vont bien. Leurs usines françaises, beaucoup moins. Le Mondial de l'automobile parisien ouvre ses portes, jeudi aux professionnels et samedi au grand public, dans un climat pour le moins paradoxal. PSA et Renault ont largement renoué avec les profits, après des pertes historiques l'an dernier. Et leurs ventes se sont remarquablement redressées. PSA les a accrues de 17 % au premier semestre, Renault de 21,7 %. Mieux que Volkswagen ou BMW. Dans l'Union européenne, PSA a augmenté ses immatriculations de 1,9 % sur huit mois (hors utilitaires) et Renault de 13,4 %, alors que les autres constructeurs du Vieux Continent chutent - sauf BMW. Et les nouveautés comme les concepts exposés par nos deux champions nationaux témoignent de leur créativité et de leur dynamisme.Pourtant, cette santé recouvrée profite peu aux sites de fabrication hexagonaux. La production automobile française n'a nullement renoué avec ses niveaux d'avant-crise, assure la dernière étude de l'assureur crédit Euler Hermes. Les volumes restent sous la barre des 2,2 millions de véhicules par an. Du coup, le taux d'utilisation des capacités de production demeure faible, de l'ordre de 65 %, d'après l'enquête. « Nos capacités sont en France calibrées pour 2,8 millions de véhicules et nous sommes pourtant parmi ceux qui les ont le plus réduites », se lamente le patron d'un des plus gros équipementiers. Les experts les plus pessimistes redoutent une rechute de la production autour de 1,5 million d'unités à terme. Une décrue redoutable pour les équipementiers et surtout le tissu de fournisseurs de deuxième ou troisième rang.PSA et Renault produisent, globalement, deux fois moins de voitures particulières en France qu'il y a quinze ans?! La production est retombée au niveau des années 1960. Même si elle a augmenté au premier semestre, par rapport à la même période de 2009. Le Premier ministre François Fillon s'est d'ailleurs alarmé de cette désindustrialisation, dans son discours du 10 septembre sur le site PSA de Sochaux. Un constat d'autant plus inquiétant que l'industrie allemande, elle, accroît ses niveaux de production outre-Rhin?!Certes, ni PSA ni Renault n'ont fermé d'usine en France. Même si « chacun a l'équivalent d'une usine en trop dans l'Hexagone », affirme un expert. Mais les effectifs des sites d'assemblage ont chuté. L'usine de PSA à Rennes a réduit le nombre de ses salariés de 10.000 au début des années 2000 à 6.400 et elle devrait probablement passer à 5.000 à l'horizon 2012. Même décroissance à Aulnay ou chez Renault à Flins et Sandouville.Devenir plus compétitiveLes sites français subissent l'implacable concurrence des usines à bas coûts hors Europe de l'Ouest. La forte demande pour les véhicules d'entrée de gamme n'a fait que renforcer le poids de ces dernières, dont c'est généralement la spécialité. Les coûts salariaux y sont évidemment beaucoup plus faibles, dans un rapport de 1 à 7 entre Roumanie et France, par exemple. Un différentiel encore plus flagrant pour les sous-traitants. Ainsi, en Corée, les fournisseurs ont des coûts salariaux encore inférieurs de 30 % à ceux des constructeurs locaux eux-mêmes, lesquels sont déjà d'un tiers moins élevés que ceux des groupes automobiles dans l'Hexagone. Une économie supplémentaire?! La délocalisation de l'assemblage d'un modèle entraîne d'ailleurs forcément celle des fournisseurs. Les fabricants de composants qui livrent Dacia sont installés à 75 % en Roumanie ou dans des pays proches. Renault évalue ainsi à 2.000 euros l'économie de coûts sur le nouveau Dacia Duster produit à Pitesti par rapport à un véhicule identique qui serait assemblé dans l'Hexagone?!Les sites extra-européens n'ont pas que l'« avantage » des bas salaires. Ils pratiquent aussi des horaires plus flexibles, grâce à une main-d'oeuvre plus docile et des lois moins contraignantes. Le site coréen de Renault ne se félicite-t-il pas d'avoir évité l'implantation d'un syndicat??La seule chance pour l'industrie automobile française, c'est de devenir plus compétitive dans l'Hexagone. Il y a dix ans, les coûts horaires en France étaient inférieurs de 20 % à ceux de l'Allemagne. Aujourd'hui, ils sont de 400 euros plus élevés, martelait Philippe Varin, patron de PSA, au dernier Salon de Genève. En plus d'une meilleure compétitivité, il faut aussi que Renault et PSA montent en gamme, pour être moins dépendants du facteur coûts. PSA s'est engagé dans cette voie, avec sa Citroën DS3 fabriquée en région parisienne, ou sa Peugeot 3008, produite dans l'est de la France.
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