Le mythe du cauchemar de la mondialisation déconstruit

Au début de décembre 1999, quelque 40.000 personnes manifestent à Seattle (États-Unis) contre le lancement d'un nouveau cycle de négociations commerciales entre 135 pays membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). C'est quasiment l'acte de naissance du mouvement de l'antimondialisation, qui se fera plus tard appeler altermondialisation. C'est en partie pour répondre aux arguments des contestataires que Jagdish Bhagwati a écrit ce « Plaidoyer pour la mondialisation », publié en 2002 dans le monde anglo-saxon et traduit aujourd'hui en français. Dans cet ouvrage, devenu un classique, ce professeur d'économie indo-américain, spécialiste des questions liées au commerce international qu'il enseigne à l'université Columbia (États-Unis), s'efforce de réfuter une à une les critiques, que ce soit en matière de pauvreté, de travail des enfants, du rôle des femmes, d'avancées de la démocratie, de la diversité culturelle, des salaires et des droits du travail, d'environnement, du rôle des entreprises. Patiemment, chiffres à l'appui, battant en brèche une critique autocentrée sur l'Occident, il montre que, sur le plan mondial, la situation s'est nettement améliorée dans nombre de pays pauvres et ce, grâce au développement des échanges commerciaux. Ce libéral, dans la tradition d'Adam Smith, fervent adepte du multilatéralisme montre combien le biais réducteur de certaines idéologies anticapitalistes, fortement antirationalistes, influence l'idéologie antimondialiste. Non seulement l'héritage du marxisme, mais également « l'influence quasi nihiliste » de philosophes français comme Jacques Derrida ou Michel Foucault, qui remettent en cause la notion même de vérité.Pour autant, le travail d'évaluation de Bhagwati de la « mondialisation économique », qui « recouvre l'intégration des économies nationales dans l'économie internationale par les échanges, les investissements directs étrangers, les flux de capitaux à court terme, les flux internationaux de travailleurs et d'individus en général, et les flux de technologie », ne signifie pas que tout va bien dans le meilleur des mondes. Que ce soit en matière de gouvernance mondiale, dans la mise en place de programmes sociaux, ou du problème complexe des flux d'immigration, l'économiste propose des ébauches de solutions pour résoudre ces problèmes.En effet, si Bhagwati argumente avec conviction en faveur du multiralisme, qui a permis une prospérité sans précédent dans l'histoire à l'échelle de la planète, il est resté circonspect, et avec une certaine prémonition à un moment où ce n'était pas courant pour un libéral de l'être, sur « l'enthousiasme dévorant du capitalisme financier international ». Dans son introduction à l'édition française, le professeur de Columbia recommande que, « dans le secteur financier, l'innovation doit être traitée différemment d'autres domaines. Il faut donc qu'un groupe indépendant d'experts, qui soient familiers de Wall Street mais ne relèvent ni de lui ni du complexe Wall Street-Trésor, évalue les dangers des nouveaux instruments et rende accessibles leurs analyses aux régulateurs ». Cela permettra au moins de sauver la « destruction créatrice », moteur du capitalisme.Robert Jules« Plaidoyer pour la mondialisation » par Jagdish Bhagwati, éditions Odile Jacob, 368 pages, 29 euros.
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