« Le G20 français vise moins de volatilité et plus de croissance »

La 41e édition du forum économique de Davos s'est achevée dimanche sur une note d'optimisme, liée à la reprise. Certes, les experts n'ont pas cherché à dissimuler les innombrables embûches : crise de la dette souveraine, volatilité des matières premières, menace de retrait des capitaux placés dans les pays émergents ou montée du chômage dans les pays industrialisés. Des risques en partie atténués par la cohésion affichée des dirigeants politiques. « Nous assistons à l'accouchement d'une gouvernance mondiale », se réjouit Pierre Nanterme, patron du groupe Accenture. Les objectifs de la présidence française du G20, mâtinés de réalisme diplomatique, ont reçu un écho favorable à Davos. Aux sceptiques sur le futur de la zone euro, les dirigeants européens, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel en tête, ont opposé leur détermination à résoudre leurs problèmes. Christine Lagarde précise à « La Tribune » les propositions françaises du G20, le chantier de l'intégration économique européenne et la réforme fiscale en préparation en France. À Davos, la France a présenté ses objectifs pour la présidence du G20. On est loin du « nouveau Bretton Woods » que le chef de l'État avait annoncé il y a un an. Pourquoi a t-on revu les objectifs à la baisse ? L'ambition est identique, mais elle est teintée du réalisme résultant des travaux déjà entrepris. L' ambition vise le long terme, le réalisme, le court terme. L'objectif est double. Parvenir à moins de volatilité, et éviter aux grands pays émergents d'être déstabilisés par les arrivées massives de capitaux, qui restent utiles à leur développement. Au final, nous visons à assurer une croissance solide, équilibrée, durable et créatrice d'emplois. Comment cette réforme du système monétaire international va t-elle se préparer ? D'abord en créant une instance appropriée pour débattre des taux de change, à laquelle évidemment participeraient les Chinois. On peut imaginer un sous-groupe au sein du G20. Autre possibilité, regrouper les pays dont les devises composent le droit de tirage spécial, l'instrument monétaire de réserve international. Encore faudrait-il qu'on élargisse le panier de monnaies sur lequel est basé le DTS, pour y intégrer le yuan chinois. Parallèlement, nous devons opter pour un code de conduite permettant de réguler les mouvements de capitaux. Où en est le projet de taxe sur les transactions financières ? C'est un travail que nous entamons avec les Allemands et nous voulons former une coalition des pionniers, mais il faut admettre que nombre de pays sont aujourd'hui très rétifs. Cette taxe pourrait prendre la forme d'une transaction sur les changes, car c'est ce qu'il y a de plus identifiable et de plus traçable. Comment ont été perçues à Davos vos propositions pour mettre fin à la volatilité du prix des matières premières ? J'ai été très surprise de l'accueil favorable réservé à ce sujet, qui est un point clé pour le développement. Nous proposons d'abord de travailler sur les marchés physiques des matières premières, en améliorant les infrastructures. Il y a aussi le travail sur les marchés financiers, pour éviter les abus de marché. À ce sujet, il faut faire le départ entre les mouvements de marché normaux, déterminés par le rapport entre l'offre et la demande, et la spéculation. La crise de la zone euro semble s'apaiser. Mais les Allemands réclament plus que jamais la mise en place de sanctions quasi automatiques pour les membres qui contreviendraient à la rigueur. La France soutient-elle cette demande ?Oui, absolument, et sans réserve. En cas de comportement déviant répété de la part d'un État, la sanction tombera automatiquement, sauf si il y a une majorité qualifiée pour estimer qu'un pays était légitime à ne pas respecter ces engagements. Quelles seront les prochaines étapes de la convergence franco-allemande ?En matière de politique économique, nous sommes tombés d'accord pour ne pas nous limiter à la correction et à la sanction des déséquilibres budgétaires ou relatifs à la compétitivité, mais à faire de la prévention, en discutant entre nous. C'est une nouvelle étape de l'intégration de la zone euro. La chancelière a donné un exemple très précis de convergence souhaitable : l'âge de la retraite. On va vers un âge de la retraite unique en Europe ? Nous avons entamé un large rapprochement, c'est indéniable. On ne peut se donner des objectifs communs de politique économique sans aborder des questions de fiscalité ? nous avons commencé à le faire ? ou sans aborder le financement des entreprises, l'offre de travail... Quant à penser qu'on va aligner tous les âges de la retraite en Europe sur la dernière réforme espagnole, qui remonte à vendredi, on n'en est pas là ! Et il ne faut pas oublier que l'âge légal n'est que l'un des paramètres. À Davos, la chancelière Angela Merkel a mis l'accent sur les négociations commerciales de Doha. On sent la France moins pressée de conclure...Ces questions de commerce international sont de compétence communautaire. De plus, la difficulté aujourd'hui en termes d'OMC et de cycle de Doha n'est pas en Europe, mais dans la partie d'équilibristes qui se joue entre les États-Unis et l'Inde tout particulièrement. Enfin, le président de la République est convaincu que le cycle ne peut se terminer sans décision des politiques. La mécanique actuelle de l'organisation mondiale du commerce, qui lie tous les sujets avec un « tout ou rien », c'est l'échec assuré.Maintenez-vous votre prévision de croissance pour la France à 2,5 % pour 2012 ?Je n'ai pas de projets de révision. On en reste à 2,5 %, et nous verrons comment se déroule l'année 2012. Idem pour 2011 où, à ce stade, je ne vois aucune raison d'amender notre prévision de 2 %. Rappelez-vous ce qu'on disait il y a un an sur la prévision de croissance de la France : en définitive, la croissance pour 2010 sera proche de 1,6 %, soit supérieure à la prévision de la loi de finances initiale et pour 2011 l'objectif est à notre portée comme le montre l'amélioration des enquêtes de conjoncture. En France, le débat sur la fiscalité du patrimoine est lancé, certains redoutent la construction d'une nouvelle « usine à gaz »...Le processus doit tenir compte à la fois des propositions des parlementaires et des objectifs que l'on poursuit, et de plus ne doit pas coûter à l'État. Je suis quant à moi favorable à quelque chose de simple, et donc d'assez radical.
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