Banque cherche client pour relation durable

« La crise financière a généré une crise de confiance du public à l'égard du système financier, en France comme ailleurs. Comme dans toutes les crises de cette nature, le financier en général et le banquier en particulier sont l'objet d'une défiance, voire d'un opprobre réellement palpables ». Ce constat n'émane pas d'une association de consommateurs, mais d'un inspecteur des finances, Bruno Deletré, dans son rapport de juillet 2009 sur « Le contrôle du respect des obligations professionnelles à l'égard de la clientèle dans le secteur financier ».Dans les ruines fumantes d'un secteur ébranlé par la crise, les banquiers ont découvert la nécessité de reconquérir leur client. Celui-ci a profondément évolué. D'abord parce que les nouvelles technologies ont repoussé les frontières. Elles ont offert un nouvel accès à l'information, sophistiquant le regard du client et donc son attente. Cela n'est pas sans conséquence sur les relations qu'il entretient avec sa banque, qu'il s'agisse du canal (un conseiller, un site Internet ou une plate-forme téléphonique) ou de la forme (le client veut avoir un contrôle sur la relation). Cela a notamment favorisé l'émergence de la multibancarisation, qui a elle-même profité de l'infidélité des consommateurs face à la multiplication des offres. L'autre facteur d'évolution est directement lié à la crise. Celle-ci a, d'une certaine manière, libéré la parole. Les clients ont commencé à exprimer une insatisfaction, qu'il s'agisse de la composition du prix des forfaits, de la reconnaissance de la fidélité, de la rotation des conseillers ou encore de la réactivité à l'occasion d'une demande.Tous ces sujets sont au coeur des réflexions (ou d'un début de mise en oeuvre) des réseaux bancaires. Dans un contexte hyperconcurrentiel et peu dynamique, la construction d'une nouvelle relation entre les banquiers et leurs clients, fondée sur la confiance retrouvée, est la clé de l'avenir des établissements.1. Reconnaître l'identit髠La carte bancaire qui vous ressemble ». Dans la « collection » offerte par la Société Généralecute; Générale, pas moins de 100 visuels sont soumis au client. De son côté, LCL est allé au bout du modèle en proposant que le client personnalise totalement sa carte. Les établissements ont désormais tous une offre large qui permet la personnalisation?: visuels au choix et cartes cobrandées ou affinitaires (qui associent la banque avec une association sportive, professionnelle, caritative, un événement). Cette évolution dans l'offre est liée à la volonté des clients d'inverser, en leur faveur, leur relation avec leur banquier. Ils attendent de la reconnaissance?: qu'on reconnaisse leur identité et qu'on leur soit reconnaissant de leur fidélité. La question de l'identité se retrouve dans le sujet des frais bancaires, avec une désaffection progressive pour les forfaits où le client a le sentiment de payer pour des services qu'il n'utilise pas. La constitution de packages sur mesure, attestant de l'individualité du client (comme cela a été initié par LCL) est une piste largement étudiée.L'identité par la carte est très à la mode. Une carte affinitaire permet de segmenter la clientèle, donc de lui proposer une offre plus adaptée. Elle permet aussi de fidéliser le client (par un programme de points) à une époque où le consommateur est volontiers zappeur. Pourtant, c'est loin d'être une panacée?: l'an dernier, selon une étude CB-TNS-Sofres, 58 % des Français ne souhaitaient pas souscrire à une offre cobrandée ou affinitaire.2. Revoir le concept d'agenceAprès s'être inspirée du secteur de la distribution en matière de marketing, la banque s'attaque maintenant au réseau physique, les agences. Pendant la décennie 2000, les banques ont développé le concept de banque à distance (Internet et téléphone) mais ont continué d'investir dans leurs agences. Mais pour quels revenus?? Ces dernières années, les agences ont été revues pour séparer les activités à valeur ajoutée (la vente) des services bancaires de base (via les machines). Au départ pour des raisons de sécurité, le mouvement a eu aussi vocation à concentrer l'essentiel des forces vers des activités rémunératrices. Aujourd'hui, le trafic dans les agences est insuffisant. Les banques s'attellent donc à proposer quelque chose de différent au client. Par exemple, en un seul lieu, présenter toute l'offre liée à un projet (le futur Mégastore du Crédit Foncier sur l'immobilier). Ou encore segmenter le type de clientèle (des agences dédiées aux étudiants ou aux patrons de PME dans le réseau des Banques Populaires ou de BNP Paribas). Et pour ceux qui ne souhaitent pas segmenter leur accueil, la technologie va débarquer en force dans les agences?: des écrans interactifs permettant des simulations en temps réel, des relations virtuelles avec des spécialistes, ou encore l'utilisation, comme dans la distribution, du code-barres dans des produits en accès libre, pour les produits simples.3. Éviter les relations perversement tariféesQue celui qui n'a jamais eu l'impression de se « faire fourguer » un produit par son conseiller lève le doigt. Derrière l'agacement de s'être laissé convaincre de prendre un produit dont on n'avait pas besoin (ou qui n'était pas le plus adapté), pointe le sentiment d'une relation déséquilibrée?: mon conseiller a utilisé sa persuasion uniquement pour faire son quota de vente sur tel produit. Parce que sa rémunération en dépend. Les banques commencent à prendre conscience du malaise chez le client. Dans son rapport, Bruno Deletré évoque certaines expériences « visant à passer d'une logique produits à une démarche concentrée sur les besoins des clients »?: il cite « des systèmes d'intéressement commercial des réseaux plus collectifs et davantage fondés sur la mesure de la satisfaction client ou la progression globale de l'encours et non plus sur les ventes de tel ou tel produit ». Ainsi, depuis peu, le Crédit Mutuel communique sur le thème?: « Au Crédit Mutuel, mon chargé de clientèle n'est pas commissionné. Et ça, ça change tout. » De son côté, dès 2001, la caisse de Crédit Agricolegricole Provence-Côte d'Azur a supprimé tout lien entre rémunération individuelle du conseiller et vente d'un produit. Georges Raspati, directeur du réseau de proximité, explique?: « Nous n'avons pas de quota ou de challenge individuel pour les conseillers. La rémunération collective est fondée sur six critères dont le nombre de nouveaux clients, la variation nette annuelle de la collecte, le volume des crédits et la conformité des dossiers. Ces données sont mutualisées sur l'ensemble de la caisse. » Guénaëlle Le Solleu ? Demain, deuxième volet de notre enquête?: Derrière le guichet, l'usine.
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