Attaqués de toutes parts, les traders ne s'avouent jamais vaincus

émunérations2009 « annus horribilis » pour les bonus ! Être trader n'a pas été de tout repos cette année. D'abord parce que ces mal-aimés de la finance ont beaucoup travaillé avec un millésime 2009 très riche en termes d'activités. Ensuite, parce qu'ils ont été la cible des critiques de la part de l'opinion publique, des politiques et des médias. Jérôme, 32 ans, trader sur les marchés actions à la Golden Bank à Paris, pourrait être le témoin type de cette année folle. Au début de l'année, il revient au bureau avec la gueule de bois. Au dernier trimestre 2008, sa banque a perdu 2 milliards d'euros à cause de la crise financière. Son patron Christophe lui annonce qu'il n'aura quasiment pas de bonus, seulement 30.000 euros par rapport aux 300.000 euros qu'il avait touchés en 2007. C'est la sinistrose dans la salle des marchés. Début février, les banques françaises publient leurs nouvelles règles de rémunération. Les bonus seront versés sur trois ans dont au moins la moitié en actions. « Fini les gros chèques de fin d'année », pense Jérôme. Pendant ce temps-là, les politiques multiplient les déclarations virulentes à l'égard des bonus des traders. « C'est une honte », va même jusqu'à déclarer le président Obama, tout juste investi. « Dans les réunions de famille ou avec mes amis, je me faisais violemment critiquer comme si j'étais responsable de toute cette crise et des maux de tout le monde », se plaint-il. Jérôme s'interroge sur son avenir de trader. Quel intérêt de continuer à travailler 15 heures par jour sans être sûr de gagner beaucoup d'argent et alors que les dirigeants du monde entier veulent voir disparaître les traders ? Il déprime.Mais le 9 mars, tout bascule. Citigroup annonce que le début d'année a été fabuleux dans ses activités de marché, surtout sur les marchés obligataires. D'un coup, les Bourses du monde entier remontent. Les entreprises en profitent pour lancer des augmentations de capital. « Le business repart », s'exclame Jérôme. Et il est d'autant plus heureux que la Golden Bank est devenue leader sur son marché suite à la disparition de Lehman Brothers et des déboires de Merrill Lynch ou d'UBS. Il fait la pluie et le beau temps sur les marchés, son business explose, son chef Christophe le complimente. Finalement, rien n'a changé. En juin, il se remet à espérer toucher un beau bonus à la fin de l'année. D'autant que les politiques du monde entier peinent à s'entendre sur les restrictions à envisager vis-à-vis de ces émoluments. Le G20 de Londres, en avril, n'a pas été une réussite. Le cousin de Jérôme, Sébastien, trader à New York, est dans la même situation. « En six mois, j'ai déjà gagné plus d'argent qu'en 2007 qui était mon année record ! » explique-t-il. Dans les salles de marché, l'espoir renaît avec l'été. La Golden Bank dégage des profits record comme beaucoup de ses cons?urs, telles Barclays, BNP Paribas, HSBC.provocationEt qui dit gros profits dit aussi gros bonus. En plein mois de juillet, les milliards de dollars mis de côté par la Golden Bank font scandale dans le monde entier. Les politiques, suivis par l'opinion, et repris par les médias, s'insurgent contre cette provocation. La fronde antitraders est relancée. Le ciel s'assombrit de nouveau. Fin septembre, les grands de ce monde se retrouvent à Pittsburgh pour un G20 historique. Le président Sarkozy est en tête de la fronde contre ces financiers aux poches profondes. « Heureusement que nous sommes là pour qu'on nous tape dessus. Pendant ce temps, personne ne se préoccupe du chômage qui explose en France. En fait, les traders sont les meilleurs alliés politiques de Sarkozy ! » ironise, non sans colère, Jérôme. Finalement, les bonus ne seront pas plafonnés mais au moins la moitié sera-t-elle payée en actions et bloquée sur trois ans. « Si nous sommes rétribués en actions, nous serons davantage encouragés à prendre des risques pour que le cours de Bourse de notre banque grimpe », explique le trader avec malice. Même s'ils ont été les cibles incessantes des politiques et des médias, les traders s'en sortent finalement pas mal car l'année a été superbe avec de belles promesses de primes. Mais las ! C'est sans compter sur Nicolas Sarkozy. Mi-décembre, à quelques jours des fêtes, le président de la République emboîte le pas au Premier ministre britannique et décide de taxer les bonus de 50 % ! Cette fois-ci, le coup porté est un véritable uppercut. Pour absorber ce coût, les banques seront obligées de baisser les bonus. Mais pas pour tous. « Comme d'habitude, les moins bons seront encore moins gâtés et paieront pour que les meilleurs restent privilégiés », explique Jérôme qui espère bien faire partie de la deuxième catégorie. Mais les traders n'ont pas dit leur dernier mot. Tant pis si on leur réduit leurs bonus, ils réclameront une augmentation de leurs salaires fixes.
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