Dix jours pour recréer la taxe carbone

On est sur une mutation en profondeur et tout ceci ne se fait pas sans difficultés, c'est normal. » Interrogé hier par l'AFP, Jean-Louis Borloo a voulu se montrer serein, après la censure de la taxe carbone par le Conseil constitutionnel. Pourtant, la plupart des experts du gouvernement étaient plutôt sous le choc. Un temps seulement, car l'heure n'est pas aux états d'âme : Nicolas Sarkozy a décidé qu'une nouvelle contribution carbone serait adoptée en Conseil des ministres le 20 janvier, intégrée dans une loi de finances rectificative liée, surtout, au grand emprunt. Compte tenu des délais de transmission au Conseil d'État, « nous disposons d'une dizaine de jours pour boucler un nouveau projet », confie un conseiller.double impositionLe point central, celui qui suscite la plus grande incompréhension au sein de l'exécutif, est la critique du Conseil portant sur les grandes entreprises industrielles, déjà soumises à un régime de quotas : la commission Rocard, tout comme les parlementaires, avaient considéré ces quotas suffisamment contraignants et potentiellement coûteux, pour exonérer ces entreprises de taxe carbone. Pas le Conseil (voir ci-contre, page 3). Au sein du gouvernement, un débat est donc entamé sur la meilleure façon de traiter ce sujet. Certains estiment qu'une justification de cette exonération, bien assise juridiquement, permettrait de contourner le problème. Il suffirait de démonter l'impact négatif qu'aurait une double imposition sur les entreprises (quotas + taxe carbone), dans le cadre de la concurrence européenne. D'autres jugent cette option dangereuse : il est impératif de prendre en compte la critique du Conseil, disent-ils, et donc de soumettre, d'une manière ou d'une autre, la grande industrie à la taxe carbone. Une perspective qui inquiète bien sûr celle-ci.Les autres débats semblent tranchés. S'agissant de la taxation de l'électricité, notamment. En 2000, rappelle l'ONG environnementaliste France Nature Environnement (FNE), le Conseil s'était opposé à l'entrée de l'électricité d'origine nucléaire dans l'assiette de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) au motif qu'il est quasi impossible de différencier, dans une consommation électrique, celle qui provient d'une source propre de celle émise via une énergie fossile.Par ailleurs, le fait d'augmenter le prix de la tonne de carbone, initialement fixé à 17 euros, permettrait d'augmenter l'efficacité de la contribution à lutter contre le changement climatique, comme le demandent les sages. Mais aussi de faire grimper l'impopularité de la mesure qui n'a jamais vraiment eu les faveurs de l'opinion publique? « En réalité, le gouvernement présentera un texte à peine différent de celui qui a été retoqu頻, prédit Arnaud Gossement, juriste et porte-parole de FNE. Le Conseil n'a ni censuré le principe de la taxe carbone, ni exigé d'y intégrer l'électricité, ni contesté le coût de la tonne de CO2, ni même interdit les exemptions. Le c?ur de la censure, c'est l'importance de celles-ci, qui conduitsent à ce que 93 % des émissions de sources industrielles échappent à l'impôt vert. Du coup, conclut le juriste, s'agissant des PME, « il suffit au gouvernement de présenter un nouveau projet de loi supprimant ces exemptions et les remplaçant, pour les catégories professionnelles concernées, par des exonérations de charges sociales, et le tour sera jou頻.
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