Programmes d'économie  : la nouvelle approche

La réforme de l'enseignement de l'économie en classe de seconde a donné lieu à la conception de deux programmes. Celui intitulé "Les principes fondamentaux de l'économie et de la gestion" constitue la vraie innovation de la réforme. Il est centré sur les décisions concrètes des agents, en particulier des entreprises, et sur la prise en compte de l'environnement dans lequel ils opèrent.

L'introduction d'un enseignement d'économie pour tous en classe de seconde, dès la rentrée prochaine, est une décision majeure de la réforme du lycée. Les élèves devront choisir au moins l'une des deux options proposées, "Sciences économiques et sociales" (SES), et "Principes fondamentaux de l'économie et de la gestion" (PFEG), le format de chaque cours étant de cinquante-quatre heures. Si le principe de la réforme a été salué par une large partie de la communauté académique, des acteurs économiques et des parents d'élèves, le débat s'est vite concentré sur la refonte du programme de SES, matière déjà proposée sous forme d'option : si certains se réjouissent du recentrage sur les outils de l'analyse économique, d'autres semblent regretter que les enjeux de société et la sociologie ne soient plus assez représentés.

Pourtant, l'innovation la plus importante de la réforme est ailleurs : il s'agit de la création de la seconde option, PFEG. L'ambition de ce nouveau programme est de montrer aux élèves que l'économie n'est pas un ensemble abstrait de mécanismes complexes, pour la plupart extérieurs à l'individu, mais le produit des décisions concrètes d'agents interagissant dans un même système. Le programme a été construit sur la volonté d'établir un "pont" entre l'économie et la gestion. Il faut montrer aux élèves que le PIB n'est pas un agrégat abstrait, mais la somme des valeurs ajoutées produites par chaque agent individuel, elles-mêmes décomposées en salaires et profit.

Il faut montrer aux élèves que l'Etat produit, comme une entreprise, à la seule différence qu'il n'échange pas sa production sur un marché. Il faut montrer aux élèves l'évolution du rôle des banques, en rappelant que leur fonction originelle est le financement des entreprises et des ménages. Une telle approche de l'économie, centrée sur le rôle des acteurs, offre aux élèves une première découverte des métiers, en même temps qu'elle leur permet de faire le lien entre le discours économique qu'ils reçoivent et la réalité qu'ils vivent au quotidien.

Prenons l'exemple du taux d'intérêt, notion un peu abstraite pour qui n'est pas économiste, mais pourtant très utile, notamment lorsqu'il s'agit de contracter un emprunt. Le but du cours doit être d'abord de montrer aux élèves que derrière cette abstraction se cachent des mécanismes et des acteurs bien réels tels que la banque centrale, le marché monétaire, le marché obligataire, l'Etat... Le but est aussi de leur montrer qu'il n'existe pas en réalité un taux d'intérêt unique, comme dans les modèles, mais une multiplicité de taux d'intérêt, selon la maturité du prêt et la qualité de crédit de l'emprunteur.

La démarche est la même lorsqu'on se penche sur la fixation des prix. Il y a d'un côté les modèles d'équilibre des prix, qui sont des points de repère utiles, et la réalité, plus subtile, des mécanismes de fixation des prix par l'entreprise. Sur un marché de concurrence pure et parfaite, par exemple, le prix est unique et s'impose à l'entreprise. Il est une donnée exogène, un paramètre sur lequel elle ne peut agir, contrainte d'appliquer le prix "fixé par le marché".

Dans la réalité, les entreprises opérant dans un environnement concurrentiel développent le plus souvent de manière autonome leur politique de prix, cherchant à s'écarter du modèle de référence par différentes stratégies, parmi lesquelles la différenciation des produits. La fixation du prix est une question située simultanément dans le champ de l'économie et du marketing.

Faire dialoguer l'économie avec la gestion : tel est l'enjeu principal de cet enseignement, dont l'objectif final est de donner aux élèves quelques clés de compréhension du système économique, dont ils sont déjà eux-mêmes acteurs.

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Commentaires 10
à écrit le 16/02/2010 à 22:56
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Cetains commentaires ici frisent le ridicule. Certains reprochent tantôt que l'enseignement des PFEG serait une regression alors que par ailleurs, ils s'offusquent du fait que celui-ci a en partie "déshabillé" le programme de SES actuel. Il faut arrê...

à écrit le 13/02/2010 à 17:52
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Messieurs, lorsque Michaël Porter sera Prix Nobel d'Economie, nous, professeurs d'économie qui ne faisons pas de la gestion, nous nous inclinerons. Dans l'immédiat, l'étude de la firme et du marché trouve ses fondements dans les travaux de Hicks ou ...

à écrit le 12/02/2010 à 15:46
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L''objectif, qui n'échappe à personne (à moins d'être particulièrement bouché), est de formater des générations précaires, dociles et incultes, à qui on pourra faire gober tout et son contraire, avec la promesse d'une soirée de détente devant "La Fer...

à écrit le 12/02/2010 à 9:40
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Quelle étrange ironie! Monsieur Betbèze fait ici l'éloge de thèmes introduits en PFEG qui ne sont que le pendant du dépeçage des SES. Décriés dans le cadre de l'enseignement de sciences économiques et sociales, ils sont ici parés de toutes les vertus...

à écrit le 11/02/2010 à 19:42
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Arrêtons la mascarade ! L'économie n'est pas la gestion. Dans les facultés d'Economie et de Gestion, les meilleurs étudiants s'orientent vers l'économie, les autres vers la gestion. Les premiers auront recours à des représentations abstraites, parce ...

à écrit le 11/02/2010 à 16:37
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Bonjour, pour éclairer vos lecteurs sur cette polémique, voici des exemples de sujets de bac S.E.S. des années précédentes : - Vous analyserez les liens entre la population active et la croissance économique (France métropolitaine, septembre 2008) ...

à écrit le 11/02/2010 à 16:35
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Article navrant. Tout ce qui est présenté comme une nouveauté existe depuis quarante ans dans les filières Sciences économiques et sociales et économie gestion. Le ministère a simplement changé les étiquettes ? et réduit les horaires. Une telle ignor...

à écrit le 11/02/2010 à 12:17
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Comme dit précédemment les programmes de SES abordent tous ces points depuis bien longtemps...Pourquoi ne vous interrogez pas sur le non sens pédagogique qui consiste à proposer deux enseignements d'"économie" en seconde ? Ancienne élève ayant fait ...

à écrit le 11/02/2010 à 10:33
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Il semble que ces universitaires ne connaissent pas les programmes actuels de Sciences économiques et sociales qui, en Seconde, puis en Première et Terminale, font une large place au monde de l'entreprise et aux mécanismes de l'économie de marché. Je...

à écrit le 11/02/2010 à 8:40
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Le programme tel qu'il existe déjà informe les élèves sur des concepts et des notions clefs comme taux d'intérêt réel et nominal, emprunt, rentabilité (voir programme officiel de S.E.S en Première et Terminale ES). Simplement, il ne se cantonne pas à...

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