Pour une nouvelle politique laitière en France

Par Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture.
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La France a des atouts agricoles considérables : une tradition viticole ancrée dans les terroirs, une capacité de production céréalière parmi les premières au monde, une production de fruits et légumes variée et de grande qualité, un élevage performant et respectueux des règles sanitaires et environnementales les plus strictes. Dans le domaine laitier également, la France est une référence. Pour valoriser ces atouts considérables, nous devons moderniser l'agriculture française. C'est le choix du président de la République et du gouvernement.

Dans le secteur laitier, la suppression des quotas en 2015 entraînera des bouleversements majeurs dans la filière. Cette suppression a été approuvée par une très grande majorité des États européens. Si la France s'y était opposée, elle serait aujourd'hui isolée. Aucune des propositions qu'elle a faites depuis deux ans en faveur de la régulation du marché laitier n'aurait été entendue.

En faisant le choix du mouvement, nous avons obtenu de la Commission européenne qu'elle alloue une aide d'urgence de 300 millions d'euros aux laitiers et qu'elle intervienne sur les marchés pour faire remonter les prix. Qui conteste aujourd'hui la remontée des cours ? Nous avons obtenu la création d'un groupe à haut niveau sur la régulation pour éviter la surproduction laitière et la baisse des prix. Qui conteste aujourd'hui les avancées sur la régulation des marchés ? Nous avons obtenu le maintien des outils d'intervention en cas de crise dans la PAC. Qui conteste aujourd'hui la nécessité de ces outils en cas de nouvelle crise ? Les propositions de la France sur la filière laitière ont été reprises dans le paquet législatif de la Commission européenne. Pour défendre les producteurs laitiers français, nous devons rester à l'offensive.

Depuis dix ans, la gestion par département a abouti à une sous-réalisation chronique du quota de lait national pouvant atteindre jusqu'à 8%. Elle a bridé les capacités de production françaises. Elle a conduit à l'importation croissante de lait en provenance d'Allemagne. C'est ce que nous voulons renverser. Dans ce cadre, nous avons besoin d'un nouveau modèle laitier français qui permettra aux producteurs d'avoir un avenir en Europe. Ce modèle repose sur trois piliers.

Premier pilier : la gestion laitière à l'échelle de neuf grands bassins au lieu de l'actuelle gestion départementale. C'est la meilleure façon de valoriser la production laitière et les potentiels de chacun dans toutes les régions. Nous refusons la concentration excessive de la production. Nous voulons maintenir une production laitière sur tout le territoire.

Deuxième pilier : les contrats. C'est le moyen le plus efficace pour garantir une stabilité du revenu des producteurs de lait, livrés à eux-mêmes pendant des années avec des revenus incertains. L'Europe vient de le reconnaître : les contrats sont nécessaires pour la filière laitière. Quel autre instrument pourrait-il garantir aux producteurs un revenu stable sur plusieurs années ? Quel autre instrument pourrait-il sécuriser les investissements, notamment des jeunes qui s'installent ?

Troisième pilier : une nouvelle organisation de la production. Pour que les contrats fonctionnent, nous voulons renverser les rapports de force entre les producteurs et l'aval de la filière. Que pèse un producteur seul face aux industriels ? Que pèse un producteur seul face à la grande distribution ? Nous avons ouvert la voie à une modification du droit de la concurrence européen désormais soutenue par une majorité d'États et le Parlement européen. C'est la première fois que nous renforçons le pouvoir de négociation des producteurs en leur permettant de se rassembler par milliers pour peser face à l'aval de la filière.

Les producteurs de lait peuvent reprendre confiance. En concertation avec les professionnels, nous sommes en train de sortir d'une gestion administrée et restrictive qui plongeait les producteurs dans une dépendance vis-à-vis des industriels et de la grande distribution, qui les maintenait dans l'incertitude sur leur revenu et nous laissait dans l'incapacité à gérer les crises.

Aujourd'hui, nous mettons en place une gestion dynamique de la production de lait qui garantira une visibilité et un revenu décent pour nos producteurs. Je sais que la situation reste difficile pour beaucoup d'exploitants, mais je suis convaincu de l'avenir de la filière sur tout le territoire en France. Les producteurs de lait savent qu'ils peuvent compter sur la détermination totale du ministre de l'Agriculture pour les soutenir.

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Commentaires 2
à écrit le 05/03/2011 à 16:13
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Non, Monsieur Le Ministre, le problème des producteurs de lait n'est pas résolu, comme de l'autre côté de la méditerranée la colère gronde: L?actualité quotidienne nous relate les révolutions en chaîne du moyen Orient et d?Afrique du Nord. Nous, pro...

à écrit le 05/03/2011 à 14:55
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Monsieur le Ministre : "qui peut contester ?" affirmez vous, un peu trop sûr de vous! : Mais, nous, les producteurs : certes le prix a augmenté en 2010 de 8% mais nous sommes au même prix qu'il y a 20 ans !!! , et nos revenus? engloutis dans la ha...

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