Repenser les fonctions du masculin et du féminin

Derrière la question de la parité se cachent des stéréotypes des fonctions masculines et féminines. Il convient d'organiser en amont une transition de compétences pour que les femmes amenées à occuper de hautes responsabilités aient une progression de carrière qui les y prépare.
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Les femmes seront amenées à occuper une place plus importante en entreprise du fait de la pyramide des âges. Toutefois, plusieurs conditions sont requises pour que cette mutation soit source de création de valeur. La qualité de leur intégration demeure un enjeu décisif : une palette de métiers et de parcours professionnels doivent s'ouvrir pour elles, afin que leurs scénarios de carrière ne buttent pas d'entrée sur le seul dilemme vie familiale-vie professionnelle. Les entreprises ne doivent pas seulement se contenter de décompter leurs effectifs féminins, mais aussi se fixer des objectifs de promotion à des postes identifiés trois à cinq ans à l'avance. Concernant les quotas de femmes dans les conseils d'administration par exemple, il ne suffit pas de respecter l'objectif des 40% en 2016, il convient d'organiser en amont la transition de compétences pour que les femmes amenées à occuper ces responsabilités en 2016 aient d'ici là une progression de carrière qui les y prépare.

Politiques et stratégies visant l'égalité présupposent que la domination masculine seule impose une série de rôles sociaux limités aux femmes. Les entreprises devraient davantage lutter contre ces stéréotypes, d'autant qu'hommes et femmes, pris dans le quotidien du travail, adhèrent, même inconsciemment, aux discriminations traditionnelles des fonctions masculines et féminines : les tâches, fonctions, statuts, domaines d'activités considérés comme relevant plus ou moins du masculin ou du féminin. Ce type d'attente fragilise les femmes dans les postes de pouvoir. Si les organisations tiennent à ce qu'hommes et femmes ne se cantonnent pas dans ces rôles, elles devraient s'interroger sur la façon dont elles déterminent et formalisent leurs besoins. Il est encore peu courant pour un manager d'engager des hommes et des femmes capables d'agir autrement à des postes marqués par ces stéréotypes. 98% des cadres (hommes et femmes) européens à des postes directoriaux ne recruteraient pas un assistant de direction. Seulement 12% des directeurs administratifs et financiers sont des femmes, en France... Dans leurs organigrammes, les entreprises entretiennent la distinction entre fonctions et services masculinisés ou féminisés.

Mais d'autres pistes restent à explorer, plus particulièrement celles du design organisationnel. Il suffit de ne plus réduire la perception de l'entreprise à une série d'objectifs atteints et de coûts, mais de porter un oeil perspicace sur les synergies et les blocages qui existent entre les services. Les dirigeants ont alors davantage le pouvoir de jouer sur les compétences croisées et ainsi de faire de leurs collaborateurs des pivots susceptibles d'anticiper les mutations. En s'attardant sur les sites des principaux MBA et départements de théories organisationnelles, on s'aperçoit qu'aucun cours sur le design organisationnel n'aborde ce fondement essentiel de l'entreprise qu'est le genre ! Or pour qu'une entreprise fasse émerger des leaders, mieux vaut redessiner un certain nombre de fonctions et passer en revue les images du masculin et du féminin au travail, dans son entreprise. Il n'est pas toujours utile de clamer que l'on peut mieux ou aussi bien faire que l'autre. Il faut surtout assumer le fait que la redéfinition des rôles dans l'entreprise n'est pas sans risque, le principal étant de ne plus s'y retrouver, mais qu'elle est aussi porteuse d'opportunités, dont celle de pouvoir se réinventer.

Comment redessiner les contours extrêmement binaires des entreprises ? N'y a-t-il pas dans l'univers symbolique de l'entreprise des signaux qui renforcent la croyance dans les schémas de domination masculin-féminin ? Le travail sur la représentation des normes sexuées constitue un levier pour essayer de fluidifier la chaîne des besoins et des causalités. La créativité révèle ainsi que ce n'est pas l'idée qui appelle les ressources, mais l'observation des ressources et des comportements présents et environnants qui font émerger les idées pertinentes et réalisables. Autrement dit, n'allons pas chercher les grands projets de réformes auprès des leaders lointains ; veillons plutôt à faire émerger de l'intérieur des leaders qui, au quotidien, inciteront chacun à poser un regard nouveau sur l'entreprise et le rôle de chacun(e) !

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