La précision du volant, la vitesse et le bruit sont ceux d'une voiture de sport. La silhouette et la position de conduite rehaussées rapportent à la catégorie SUV. Les jantes de 23 pouces et les freins Brembo carbone-céramique sont présents pour rappeler qu'Aston Martin est aussi un exceptionnel metteur au point de châssis, à l'affût de la moindre masse non suspendue. Bienvenue à bord du DBX 707, présenté avant son lancement comme le SUV le plus puissant du monde : 707 chevaux, soit 157 unités de plus que le DBX standard, sorti en 2020. Ce dernier représentait déjà en 2021 plus de la moitié des ventes du constructeur britannique.
Positionnement ultra-sportif
Sauvé de la faillite en 2020 par l'investisseur canadien Lawrence Stroll, recapitalisé une nouvelle fois le 15 juillet par le fonds souverain d'Arabie Saoudite, deuxième actionnaire avec 16,7 % du capital de la société, Aston Martin réalise avec le DBX 707 un exercice de style à contre-temps.
Tandis que les autres constructeurs de SUV de luxe, à l'image de Porsche, se sont lancés dans l'électrification de leurs puissants 4x4, la marque favorite de James Bond s'en tient au sans-plomb.
Des soupapes et des bougies, à l'ancienne. Le moteur V8 4.0 biturbo est fourni par AMG, le département performance de Mercedes. La calandre élargie pour favoriser le refroidissement, les appendices aérodynamiques en carbone et la présence d'un mode Sport+, qui déconnecte toutes les assistances électroniques et configure une réaction plus vive de l'accélérateur, confirment le positionnement ultra-sportif de ce SUV.
Test grandeur nature sur le circuit de vitesse de Baden-Baden
En avant-première sur l'anneau de vitesse de Baden-Baden, où Aston Martin a convoqué des journalistes germanophones et scandinaves pour essayer l'ensemble de sa gamme, le DBX 707 apparaît comme le choix le plus confortable.
Les suspensions sont réglables par un bouton rotatif sur la console centrale. Contrairement au coupé DBS Superleggera et au roadster Vantage F1 plaqué au sol par son immense aileron arrière, le SUV aborde ses virages avec un semblant de roulis. La prise d'angle du châssis informe le conducteur sur les limites physiques de l'engin pénalisé par son poids (2,2 tonnes) et son centre de gravité haut placé. Les propriétaires s'en souviendront sur les routes de montagne.
Un mode Sport + déjanté
Les accélérations sont phénoménales, accompagnées par les hurlements des quatre sorties d'échappement qui, en mode Sport +, libèrent une soupape pour lâcher des vocalises aiguës et puissantes. On se demande comment un tel système peut être homologué.
Ben Collins, l'instructeur pilote mandaté par Aston Martin pour accompagner notre prise en main du DBX 707, parvient en mode Sport + à faire glisser l'engin des quatre roues. Pas étonnant, Ben est la doublure (stunt-man) de James Bond depuis Quantum of Solace dans toutes les scènes de cascades automobiles. Les passagers, bien accrochés, sont secoués à droite et à gauche. C'est encore plus délirant quand l'installation hifi (14 haut-parleurs, 800 watts) joue les accents suaves de Barry White. Ou sur le thème jazzy de 007 par Monty Norman.
Dans cet habitacle caractérisé par sa débauche de cuir sur la planche de bord, de carbone et d'alcantara sur les contre-portes, les Anglais ont maintenu un positionnement Grand Tourisme - qui contraste avec l'effet shaker mentionné précédemment.
Le tableau de bord numérique se décompose en trois parties. Il fait l'impasse sur l'immense compte-tours et le chronomètre central que l'on trouve chez Porsche. Les commandes de la boîte automatique à neuf rapports se trouvent au sommet de la console centrale, dans une position peu ergonomique qui oblige à décoller les épaules du siège baquet quand on veut atteindre les boutons Park, Reverse ou Drive. En revanche, les palettes situées derrière le volant, en aluminium et très largement dimensionnées, permettent de monter les rapports manuellement ou de rétrograder de manière bien plus instinctive. Et c'est addictif. On est surpris par la facilité avec laquelle on descend quatre ou cinq rapports à la volée, pour accompagner un freinage violent.
Les pneumatiques Pirelli P Zero, en 325 millimètres de large à l'arrière, assurent un grip phénoménal - et incompréhensible, vu le poids de l'engin. En sortie de virage, le moteur prend des tours à la manière d'une moto sportive. La poussée s'arrête à 7.000 tours/minute, à la limite de la zone rouge du compte-tours. Un plaisir coupable.
"Q", l'armurier de James Bond, fournit les options
Dans nos régions, un tel véhicule ne s'adressera pas à des conducteurs raisonnables. Moins diffusé qu'un Porsche Cayenne ou un Audi Q7, le DBX 707 doit être considéré comme un jouet confidentiel pour amateurs fortunés. Il est à parier que les kilométrages parcourus resteront très faibles, à l'instar de toutes les supercars. Une Bugatti Chiron ne parcourt, en moyenne, que 1.400 kilomètres par an. La vitesse de pointe (310 km/h sur le DBX 707) devient mention inutile.
Pour les options, qui permettent de configurer l'habitacle en différentes qualités de cuirs, il faudra passer par le département "Q" d'Aston Martin, autre clin d'œil du constructeur britannique à l'armurier et accessoiriste de la saga James Bond.
Chant du cygne
Le DBX 707 apparaît comme le premier et le dernier représentant d'une lignée contre nature : le mariage d'un moteur surpuissant et d'une silhouette en vogue, celle des SUV. La fin est déjà proche. Les normes environnementales rendront bientôt impossible sa commercialisation sur certains marchés européens et asiatiques. En 2030, l'ensemble de la gamme Aston Martin sera électrique, a prévenu Lawrence Stroll. Les groupes motopropulseurs seront, encore, fournis par Mercedes.
Le DBX "standard" est déjà le modèle le plus vendu d'Aston Martin. Cette déclinaison vitaminée, facturée à 239.000 livres (281.000 euros) au Royaume-Uni et qui arrivera en France en fin d'année, doit surpasser les ventes de la version 550 chevaux.
On pourra l'acheter pour effectuer un placement financier, à condition que les options (vert racing ou gris métallisé) soient bien choisies. Ou pour le plaisir de contempler sa malle arrière, joliment dessinée en queue de canard, ou sa calandre béante caractéristique à l'ADN de la marque depuis la DB4 et le coupé DB5 de James Bond.
Au terme de l'essai du DBX 707, mené sur circuit à un rythme très soutenu, l'indicateur de consommation moyenne indiquait 50,5 litres aux 100 kilomètres... C'est décidé, l'Aston restera au garage.
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