Climat : enfin de bonnes nouvelles !

Par Philippe Mabille  |   |  715  mots
Paradoxalement, alors que les activistes du climat dénoncent à qui mieux mieux « le capitalisme » ou « la finance », les actionnaires et les prêteurs deviennent les meilleurs alliés de la lutte contre le réchauffement climatique. (Crédits : Pixabay / CC)
ÉDITO. Au "Climate Finance Day", colloque de réflexion sur la finance et le climat organisé par le secteur financier ce vendredi à Paris, la finance française a rivalisé d'annonces pour montrer que la prise de conscience écologique du secteur n'est pas du greenwashing. Par Philippe Mabille, directeur de la rédaction.

La 25e conférence de l'ONU sur le climat se tiendra finalement à Madrid du 2 au 13 décembre prochains, quatre ans après la signature par 195 pays et l'UE de l'Accord de Paris. Dans un rapport publié cette semaine, l'ONU a tiré la sonnette d'alarme, soulignant l'écart entre la réalité des émissions de gaz à effet de serre (GES), dont la courbe a continué d'augmenter l'an dernier, et les objectifs inscrits lors de la COP21 : pour limiter le réchauffement climatique à 1,5° C (ou 2° C) par rapport à l'ère pré-industrielle, l'humanité aurait dû infléchir ses émissions de GES avant 2020 pour ensuite atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050. C'est-à-dire une balance égale entre ce qui sera émis et ce qui sera absorbé par la nature, qu'il s'agisse des forêts, des sols ou des océans.

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Le temps presse

L'ONU confirme ce que nous disent les scientifiques du Giec : à force de procrastiner, le temps presse. Pire, l'horloge climatique accélère. Pourtant, paradoxalement, les prises de position d'un Trump aux États-Unis ou d'un Bolsonaro au Brésil, par leur outrance, jouent les repoussoirs. La société civile, mobilisée par la jeunesse qui craint de devenir la « dernière génération » sur terre, fait bouger l'opinion ; les collectivités locales, plus proches des citoyens car à portée d'engueulade, les entreprises, plus proches des consommateurs de plus en plus écolos, sont aussi en train de radicaliser leurs actions.

Paradoxalement aussi, alors que les activistes du climat dénoncent à qui mieux mieux « le capitalisme » ou « la finance », les actionnaires et les prêteurs deviennent les meilleurs alliés de la lutte contre le réchauffement climatique. Pour une raison triviale, mais finalement assez efficace : c'est l'argent qui gouverne le monde. On voit ainsi les banquiers, les assureurs et les grands investisseurs institutionnels privés réclamer aux entreprises d'accélérer leur sortie du carbone. Du charbon, mais aussi parfois du gaz, qu'on a longtemps présenté comme une énergie de transition.

Pressée par les ONG d'en faire plus pour le climat, la finance française multiplie les initiatives, cherchant un équilibre entre abandon des énergies fossiles, maintien de la rentabilité et accompagnement de l'économie dans sa transition énergétique, sans toujours convaincre. Ces questions ont été au cœur du "Climate Finance Day", colloque de réflexion sur la finance et le climat organisé par le secteur financier vendredi à Paris. Les assureurs et les banques françaises rivalisent d'annonces d'engagement à réduire les financements accordés à des projets "carbonés".

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Multiplication des initiatives

Même un groupe pétrolier comme Total a (enfin) compris que c'est désormais sa survie qui est en jeu, et pas seulement son image de pollueur, laquelle l'a empêché de devenir sponsor des JO de 2024 (la Ville de Paris lui a préféré EDF). En France, l'assureur Axa vient de durcir sa politique de désinvestissement du charbon pour sortir complètement de cette industrie d'ici à 2030 dans les pays développés de l'OCDE et d'ici à 2040 dans le reste du monde.

En réalité, toute l'économie, toutes les entreprises, sont en train de repenser leurs organisations, leurs modes de production et de distribution avec pour motto l'urgence climatique. Les télécoms ne sont pas en reste et Stéphane Richard, le patron d'Orange qui a pris l'an dernier la présidence de la GSMA, qui regroupe tous les opérateurs mondiaux, estime que la neutralité carbone en 2050 n'est pas suffisante :

« Si Internet était un pays, ce serait le sixième émetteur de CO2 du monde. Il faudra aller plus vite pour réduire les émissions et Orange prendra des engagements en ce sens lors de sa prochaine journée investisseurs début décembre », a-t-il dévoilé devant l'Idate à Paris la semaine dernière.

Dernier exemple, l'aviation, pointée du doigt par le mouvement anti-avion, accélère ses efforts pour parvenir à compenser le carbone qu'elle émet. Compenser, en finançant des forêts, c'est bien ; mais effacer, ce serait encore mieux.

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