« Le monde actuel est ultralibéral. Par conséquent, il devra être ultrasocial » Alexandre Mars, Epic

Alexandre Mars a fondé Epic, une startup à but non lucratif qui promeut le partage à l'aide du numérique. En permettant la transparence, quasiment en temps réel, sur l'impact des actions menées par les associations qu'elle suit, sa plateforme redonne confiance aux donateurs.
Alexandre Mars, fondateur d'Epic
Alexandre Mars, fondateur d'Epic (Crédits : Fondation Epic)

LA TRIBUNE - Selon vous, peut-on imaginer un capitalisme plus responsable ?

ALEXANDRE MARS - Il n'y a pas d'alternative. Le monde dans lequel nous vivons est ultralibéral, c'est un fait. Par conséquent il devra être ultrasocial. On ne peut plus choisir entre soit faire du bien soit faire de l'argent, parce que ne survivront que ceux qui feront les deux, en même temps. Et aujourd'hui, il existe des solutions innovantes et simples, il suffit de les mettre en oeuvre.

En quoi l'engagement des entreprises devient-il une nécessité ?

Les entreprises sont entrées dans une ère nouvelle et ce, sous l'influence principalement de la génération Y, mais pas seulement. Aujourd'hui, une grande majorité des salariés accordent une importance au sens dans le travail. Plus de

60 % des jeunes souhaitent que leurs employeurs soutiennent une cause sociale. Les attentes vis-à-vis du monde du travail, de la consommation et des loisirs sont fondées sur certaines valeurs positives. Une entreprise portant des valeurs marque des points vis-à-vis de ses salariés comme de ses partenaires extérieurs. Quand on doit choisir entre deux entreprises dont les propositions se valent sur le terrain économique, c'est l'aspect social qui peut contribuer à faire la différence.

En quoi la philanthropie fait-elle bouger les lignes en matière de solidarité ?

Pour moi, la générosité ne doit pas se calculer en « ou » mais en « et ». En effet, elle n'est pas l'affaire de la seule philanthropie ou de l'État, ou de la religion. Elle est l'affaire de tous. Aussi, il ne faut pas oublier qu'aujourd'hui les richesses sont majoritairement entre les mains des entreprises. Et la philanthropie peut apporter des solutions pour mieux donner. C'est ce que nous faisons à Epic.

Dans votre livre, La Révolution du partage, vous évoquez « le manque de confiance dans les entreprises : à l'ère de l'ultralibéralisme, nous n'avons pas toujours tort de les soupçonner de greenwashing quand elles mettent en avant leurs initiatives en faveur du bien social ». Est-ce un blocage culturel selon vous ?

Il s'agit davantage d'une question de confiance. En effet, de manière générale, nous avons tous beaucoup de raisons de manquer de confiance. Pas assez confiance dans les gouvernements, les ONG, les entreprises... Bref, nous nous méfions de tout, même de ce que nous avons dans notre assiette. Or, la confiance est un élément indispensable qui permet d'avancer dans la vie, même si elle porte un risque en elle. En tout cas, c'est sur la confiance que j'ai personnellement bâti mon existence.

Comment réconcilier la société avec l'entreprise ? Pensez-vous que la transparence pourrait lever cette défiance ?

Au-delà de la question de la transparence qui me paraît évidemment indispensable, les entreprises ne doivent plus se contenter de définir une politique de responsabilité sociale. Il faut la vivre. Aujourd'hui, les salaOn ne peut plus choisir entre soit faire du bien soit faire de l'argent riés ou les consommateurs ne se contentent plus de deux paragraphes dans un rapport que l'entreprise rend public, ils exigent une présence continue, quasiment quotidienne, du bien social au sein et en dehors de l'entreprise. La bonne nouvelle, c'est que des solutions simples, innovantes et indolores existent.

À Epic, nous appliquons les principes et les méthodes du business au monde philanthropique. En créant cette startup à but non lucratif il y a quatre ans, j'ai eu la même approche qu'en créant chacune de mes précédentes entreprises : mener une étude de marché pour identifier les besoins du secteur et développer des solutions innovantes pour y répondre. Nous avons tout d'abord identifié les principaux freins au don : le manque de temps, de connaissance dans la sélection des organisations sociales à qui donner et de confiance dans le suivi des dons. Pour répondre à ces problématiques, Epic sélectionne des organisations sociales exceptionnelles et à fort impact au travers d'une méthodologie sophistiqué et selon 45 critères de sélection. À ce jour, nous avons retenu dans notre portefeuille 30 organisations sociales dans 12 pays à travers le monde.

Par ailleurs, nous avons réinventé l'expérience du don grâce aux nouvelles technologies. Nous avons créé une application mobile permettant aux donateurs de rester informés en temps réel des dernières actualités des organisations qu'ils soutiennent. Nous avons également réalisé une série de films en réalité virtuelle qui transportent instantanément les donateurs sur le terrain afin d'avoir une meilleure perception de l'impact de leur don. Une façon de vivre sa philanthropie de façon inégalée. Enfin, nous proposons d'autres solutions qui s'adaptent aux profils économiques des donateurs comme l'arrondi sur salaire, le don sur les transactions ou encore la promesse du partage, « Epic Sharing Pledge », qui permet aux entrepreneurs de s'engager à donner un pourcentage de la vente future de leur startup, ou aux sociétés de private equity de donner un pourcentage de leurs frais de gestion et/ou de leurs plus-values.

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Commentaires 7
à écrit le 14/10/2018 à 21:25
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La France est ultra collectiviste avec son Etat tentaculaire. Seule une économie de partage généralisé peut mettre l'Etat en échec et restaurer la liberté de choix des citoyens.

à écrit le 14/10/2018 à 19:14
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Nous sommes revenu au temps des seigneurs qui s'accaparaient toutes les richesses et redistribuaient quelques miettes sous forme de "bonnes-oeuvres". La théorie du ruissellement n'est qu'une description du fonctionnement monarchique. Le poids des mon...

à écrit le 14/10/2018 à 17:58
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Et hop, un petit coup de doxa libérale. Encore un pas vers le désengagement des états, citoyen, non seulement tu dois payer des impôts au titre de la solidarité (fort bien) mais tu dois encore te substituer à l'état qui veut la pratiquer de moins en ...

à écrit le 14/10/2018 à 15:46
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Les jeunes ce sont des «  masses incrédules «  La seule réalité est celui que nous voyons avec nos yeux et nous comprenons avec notre intellect de manière répétitive Ce monde est éphémère, trop d’illusion, trop de désillusions L’engagement soc...

à écrit le 14/10/2018 à 12:13
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"Il n'y a pas d'alternative. Le monde dans lequel nous vivons est ultralibéral, c'est un fait. Par conséquent il devra être ultrasocial." Heu... donc il n'y a pas d'alternative ou il y en a ?

à écrit le 14/10/2018 à 11:30
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Il y a un vide au niveau des transactions numériques, Toutes les applications qui n’ont pas de paiement sécurisées sont à exclure. Exemple : les ventes par le bon coin , une application qui informe mais aucune prise de responsabilité sur les transac...

le 14/10/2018 à 19:10
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Je ne suis absolument pas d'accord. Une transaction doit rester privée. Quand un employeur me propose un job, on affiche pas les détails de la transaction. On a encore ici la liberté de négocier, et c'est ce qui fait que nous sommes encore dans un pa...

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