L'épargne en zone euro : le grand écart intenable

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, le grand écart intenable de l'épargne dans la zone euro

Depuis plusieurs années l'Europe semble souffrir d'un excès général d'épargne. Général, car il faut prendre en compte les ménages, bien sûr, mais aussi les entreprises et les administrations publiques. C'est donc au niveau de la Nation qu'il faut placer le curseur, et le bon indicateur à suivre, c'est celui de la balance courante.


Deux lectures comptables sont possibles

Elles n'en restent pas moins intuitives : il y a excédent

  • 1/ quand on dépense moins que les revenus dont on dispose,. ou
  • 2/ lorsque l'on investit moins que ce qu'on a épargné.

L'excédent du compte courant a atteint quasiment 360 milliards d'euros en 2016, en zone euro. C'est un record historique en valeur absolue qui représente plus de 3% du PIB.

Il est évident qu'un changement radical s'est produit depuis la grande récession et que la zone euro est en excès d'épargne ou en sous-investissement, soit les deux faces du même problème. Le ratio de l'investissement total rapporté au PIB chute avec la grande récession pour céder jusqu'à 3,6 points par rapport à son sommet. Depuis, son redressement est très modeste. Au rythme actuel, il faudrait 20 ans environ, pour juste retrouver la moyenne de long terme.

Il y a bien sûr des raisons structurelles au sous-investissement, liées notamment au vieillissement de la population. La vieille Europe est une réalité démographique comme l'indique la progression de l'âge médian de sa population : + 4,5 ans entre 2001 et 2015 et cela va continuer. Quant à la part des plus de 65 ans dans la population totale, elle frôle désormais les 20% Ces évolutions se traduisent par des besoins en logements et, notamment, en équipements collectifs qui tendent à se réduire ce qui limite mécaniquement l'investissement. De même, le délire immobilier en Espagne a poussé l'investissement résidentiel à des niveaux extravagants, corrigés depuis, ce qui a pesé sur l'évolution d'ensemble.

Mais l'explication est un peu courte

Même en se concentrant sur le seul investissement productif, le compte n'y est pas. Il reste insuffisant et si les entreprises n'investissent pas, c'est que la demande attendue reste trop faible et dissuade les chefs d'entreprise de passer à l'offensive. 
Là aussi, l'explication n'est pas complète. Selon une étude de la Banque de France, le coût des capitaux propres est resté élevé. Les marchés continuent à exiger des rendements à deux chiffres sans tenir compte de la baisse des taux d'intérêt, ce qui pousse les entreprises à jouer davantage la carte des dividendes et des achats d'actions que celle de l'investissement. Ce n'est bien entendu qu'une vision d'ensemble.

Or le problème avec la zone euro, c'est qu'à la moyenne il n'y a bien souvent personne. Si on prend comme juge de paix le solde courant, les situations sont très polarisées.: Avec d'un côté la France, déficitaire. Première lecture, la France vit au-dessus de ses moyens et dépense plus qu'elle ne gagne... ou, pour le moins, disons qu'elle ne dispose pas d'excès d'épargne. C'est à rebours d'une idée bien ancrée. La France ne bénéficie pas d'un atout caché, de réserves inexploitées de croissance à travers son épargne abondante. Rien n'est plus faux. L'épargne des ménages est la contrepartie de la désépargne des autres secteurs, notamment celle du secteur public qui la stérilise en partie.

De l'autre, Changement de décor avec l'Allemagne, avec un excédent courant de quasiment 9%. Les Pays-Bas sont exactement dans la même situation. Et c'est bien là une pomme de discorde majeure dans la politique à mener par la BCE. Dans un cas, disposer de faibles taux d'intérêt est parfaitement adapté, dans l'autre une remontée des taux vous est favorable. L'excès d'épargne de la zone euro est une vue de l'esprit, car celui-ci se concentre surtout en Allemagne et aux Pays-Bas. Ce qui ne serait pas un problème s'il était recyclé dans les autres pays européens. Mais ce n'est pas le cas. C'est bien pourquoi nous sommes dans une impasse, une de plus !

 >> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaire 1
à écrit le 20/02/2017 à 14:20
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ET oui comme vous dites, une impasse européenne de plus. Merci pour cet article.

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