Et voilà que Rachida Dati, candidate LR à la mairie de Paris, décroche, avec 19 %, la deuxième place dans les intentions de vote au premier tour des prochaines municipales, juste derrière l'actuelle maire Anne Hidalgo (25 %). Manifestement, les députés LREM Benjamin Griveaux (15 %) et Cédric Villani (13 %) paient cash la division de leur camp. Pour les commentateurs qui avaient enterré un peu vite « l'ancien monde », ce sondage Ifop constitue une surprise. Bien sûr, Dati, maire du 7e arrondissement de la capitale, s'est empressée de se présenter comme « le vote utile » face à Hidalgo. Étonnant retournement de situation : Paris avait voté à une écrasante majorité Emmanuel Macron en 2017.
C'est dire si les prochaines élections municipales vont être intéressantes à étudier. Alors que le mandat présidentiel aborde son dernier tiers, La République en marche va-t-elle réussir à confirmer sa position obtenue lors des précédentes élections européennes (32,92 % des voix) ? Les électeurs de la droite vont-ils tenter de nouveau l'aventure LREM ou préférer leurs maires sortants ?
On s'active en coulisses pour éviter un nouveau duel Macron/Le Pen
Surtout, l'offre politique va-t-elle pouvoir se diversifier à deux ans du prochain scrutin présidentiel ? Face au scénario où l'on verrait Emmanuel Macron affronter de nouveau Marine Le Pen au second tour, de nombreux acteurs s'organisent en coulisses pour proposer des alternatives.
Même des soutiens d'Emmanuel Macron en 2017 réfléchissent à proposer une autre ligne politique aux Français. Car le président du « nouveau monde », en se déportant largement sur sa droite, a laissé peu à peu un espace vacant au centre gauche, suscitant les espoirs de renouvellement de certains.
C'est le cas d'un socialiste « réformateur », Gilles Savary, qui s'était opposé en pleine présidentielle au candidat du PS, Benoît Hamon :
« Je ne pourrai pas faire ta campagne ni te soutenir. J'appelle à voter Macron », avait-il affirmé à l'Assemblée nationale.
"Macron nous a liquidés aux législatives"
L'ancien député de Gironde fut l'un des premiers socialistes à apporter son soutien à l'ancien ministre de l'Économie, après Gérard Collomb, le maire de Lyon. Mais refusant d'abandonner le PS après la victoire d'Emmanuel Macron, Savary s'était finalement fait battre par la vague LREM-Modem :
« En réalité, comme on ne voulait pas quitter le PS, Macron nous a liquidés aux législatives. Depuis, on est resté sur notre ligne politique. Les sociaux-démocrates ne sont pas morts. On n'est pas dans le bonapartisme béat », nous assure-t-il, prenant clairement ses distances avec l'actuel président.
Avec quelques autres, le socialiste est en train de préparer activement un appel des sociaux-démocrates qui devrait être lancé quelques jours avant les municipales. Non encarté à La République en marche, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, qui avait lancé l'année dernière son propre mouvement, Les Progressistes bretons, pourrait apporter son soutien à une telle initiative. Ce n'est pas le seul parmi les socialistes pro-Macron en 2017 à se poser des questions. L'avocat Jean-Pierre Mignard, ancien compagnon de route de François Hollande (avec Jean-Yves Le Drian, les trois hommes s'étaient engagés dans le club Témoin pour soutenir Jacques Delors dans les années 1990), multiplie ainsi les tweets critiques à l'encontre de la politique du gouvernement, notamment sur la question des libertés publiques, au moment même où les violences policières commencent à faire polémique au sein même de l'actuelle majorité.
Les écologistes ont le vent en poupe
Pour Gilles Savary, l'enjeu n'est pourtant pas de revenir en arrière :
« On ne reviendra pas au monde d'avant. À l'heure où l'espace politique se polarise entre l'écologie et les identitaires, notre proposition ne peut pas être uniquement un bégaiement du PS. »
En attendant, c'est justement les écologistes qui semblent profiter de la soudaine prise de conscience de l'opinion publique mondiale quant à l'avenir de la planète. De Bordeaux à Montpellier ou Besançon, les listes EELV sont créditées de fortes intentions de vote à deux mois du scrutin. Les écologistes se retrouvent en position de favoris, capables de ravir plusieurs grandes villes. Lors des européennes, la liste EELV emmenée par Yannick Jadot était arrivée en troisième position (derrière le RN et LREM) avec 13,5 % des suffrages. Aujourd'hui, les écologistes pourraient bel et bien prendre le leadership d'une troisième voie face au duel entre LREM et RN, et à terme, bousculer les cartes pour 2022.
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