"Nous sommes tous des Franciliennes et des Franciliens"

Le premier adjoint à la Maire de Paris, Emmanuel Grégoire, répond à la tribune « Madame Hidalgo, n’aggravez pas encore le fossé entre Paris et la grande couronne » parue dans Le Figaro (*) le 20 janvier.
(Crédits : DR)

En début de semaine, des élus franciliens de droite ont mis en cause la Maire de Paris sur plusieurs de ses propositions en matière de déplacements. Dans cette tribune, les Versaillais de 1871 côtoient les gilets jaunes de 2018. On y accuse notamment Anne Hidalgo « d'allumer des incendies autour de Paris » en même temps, étrange paradoxe, qu'on fait de Paris un bouc-émissaire. La capitale ne paierait pas sa part en matière de transports collectifs. Elle se montrerait méprisante à l'égard des communes périurbaines et rurales. Elle reporterait le financement des crèches, écoles, collèges, lycées sur la grande couronne. Elle rêverait d'« ôter leur droit à la parole aux territoires de la grande couronne qui irriguent quotidiennement la Ville Lumière de leurs forces de travail » (sic).

Mais à une polémique futile, préférons un éclairage utile.

Rappelons d'abord que Paris, via la péréquation, contribue à plus de 50% de la solidarité financière au sein de l'Île-de-France et à plus de 20% à l'échelle nationale - soit plus de 600 millions d'euros par an reversés aux autres collectivités. Notre capitale est la collectivité la plus solidaire de France, et par conséquent d'Île-de-France.

Autre pseudo symbole d'un « égoïsme parisien », les voies sur berge sont maintenant piétonnes. Cette décision n'aurait pas été concertée ? Elle était pourtant dans le programme de Bertrand Delanoë en 2008 avec la rive gauche et dans celui de l'actuelle majorité en 2014. Elle a été mise en place en 2016 et définitivement validée par la justice en 2018. Entre l'idée et l'application, il s'est donc écoulé plus de dix ans. Au regard de l'urgence climatique comme de la concentration de la pollution dans les zones les plus denses, ce délai apparaît des plus raisonnables.

La question du financement des transports collectifs franciliens est également évoquée. Aujourd'hui, quand Paris verse un euro par habitant pour les transports, les habitants des Hauts-de-Seine versent 36 centimes par habitant et la Seine-et-Marne 3 centimes par habitant. Il ne s'agit pas ici d'opposer des territoires car c'est une situation qui vient de loin. Mais, à tout le moins, l'idée d'un Paris « mauvais payeur » est sans fondement.

Les mesures relatives à la gratuité sont contestées. C'est un désaccord que nous assumons. Que ce soit la gratuité du Pass Navigo pour les Parisiens de moins de 11 ans, le Pass Navigo gratuit pour les Parisiens de moins de 20 ans handicapés, le remboursement de 50% du forfait Imagin'R pour les collégiens et les lycéens ou la prise en charge de l'abonnement Vélib' pour les 14-18 ans : ces évolutions, c'est plus de pouvoir d'achat et plus d'écologie. Nous les revendiquons. Et nous constatons que la Présidente de la Région Île-de-France vient de prendre une mesure similaire.

La question du logement, en particulier celle du logement social, est soulevée. En 2001, Paris comptait autour de 13% de logements sociaux ; aujourd'hui, c'est plus de 20% et nous allons prochainement inaugurer le 100.000e logement social livré depuis 2001. N'oublions jamais qu'habiter Paris implique de consacrer une part souvent plus importante de ses revenus à son logement que sur le reste du territoire francilien. Pour la taille moyenne des chambres ou pour les espaces verts notamment, il y a des contraintes que les Parisiennes et les Parisiens mesurent chaque jour.

Dernier point : la proposition formulée par Anne Hidalgo de voir une partie des compétences de transport transférée à la Métropole du Grand Paris. Il ne s'agit en aucun cas d'écarter des territoires et leurs habitants de la représentation démocratique - qui pourrait le croire ? Il s'agit juste de mieux prendre en compte les réalités des déplacements d'aujourd'hui, en particulier celles de la zone dense, avec par exemple le réseau de bus, l'autopartage ou le Vélib. Toutes les grandes métropoles de France, via notamment les intercommunalités, sont compétentes en matière de transport parce que tout simplement c'est le bon niveau de gouvernance.

Créer et attiser une opposition artificielle entre Paris et les autres communes est absurde : c'est aussi dangereux. Qui peut ou veut faire croire qu'une « compétition » se jouerait entre Paris et la métropole contre la grande couronne ? À l'échelle internationale, qui fixe les grands enjeux de demain, nous sommes dans le même bateau et l'affaiblissement des uns serait l'affaiblissement de tous.

Pour l'élaboration du bien commun, les citoyennes et les citoyens souhaitent que leurs élu.e.s coopèrent ; en d'autres termes, ils attendent des poignées de main et pas des bras de fer. Dans notre pays ces dernières semaines, des fractures, jusqu'alors plus ou moins souterraines, ont surgi, saillantes, brutales, inquiétantes. Il n'y sera pas répondu par des allégations ou des insinuations, mais par plus d'écoute, de justice et d'égalité - en d'autres termes, par plus de République, et elle se construit ensemble.

Emmanuel Grégoire

___

(*) Publiée dans Le Figaro et intitulée « Madame Hidalgo, n'aggravez pas encore le fossé entre Paris et la grande couronne »

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 3
à écrit le 12/02/2019 à 7:37
Signaler
Paris ville de 2 millions d'habitants dont 16% qui vivent sous le seuil de pauvreté verse plus de 50% de la péréquation régionale. 600 millions de nos poches qui partent vers la banlieue et la province. Et le riche département des hauts de seine et s...

à écrit le 02/02/2019 à 14:33
Signaler
"Mais à une polémique futile, préferons un éclairage utile" Qu est ce que c est beau.... Je sens l erection poindre : D Je relis ca avant de me coucher.

le 04/02/2019 à 5:14
Signaler
" .....poindre": D...! Que vouliez-vous dire ? Quel suspense.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.