Dossier Scribeo

Focus sur les préjudices économiques liés à un accident

Maître Marie-Hélène Eyraud, Avocat Associé au sein du Cabinet d’avocats Serge Beynet spécialisé dans le droit des victimes, répond à nos questions.
Maître Serge Beynet & Maître Marie-Hélène Eyraud
Maître Serge Beynet & Maître Marie-Hélène Eyraud (Crédits : Cabinet d’avocats Serge Beynet)

Quels sont les préjudices économiques liés à un accident?

Au titre des conséquences économiques d'un accident, les tribunaux indemnisent la victime de ses pertes de gains professionnels actuels subies entre l'accident et la consolidation des séquelles (sous déduction des indemnités maladie), de ses pertes de gains professionnels futurs après la consolidation des blessures, ainsi que l'incidence professionnelle.

Les deux premières notions sont facilement appréhendables, il s'agit de comparer le revenu perçu par la victime avant et après l'accident pour en déduire la perte de rémunération constatée du fait de l'arrêt maladie d'une part, puis d'une éventuelle impossibilité de conserver le même niveau de rémunération après la consolidation des séquelles, d'autre part. Doivent être ensuite déduites de ces calculs, les indemnités maladie et les rentes invalidité ou incapacité du travail.

L'incidence professionnelle est un concept qui, indépendamment des pertes de gains professionnels, vise à indemniser les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle, telle que la dévalorisation sur le marché du travail, la perte d'une opportunité professionnelle, l'augmentation de la pénibilité dans l'emploi, la nécessité de se reconvertir, l'incidence sur les droits à la retraite.

Si certaines composantes de cette incidence professionnelle sont mathématiquement évaluables, comme par exemple les pertes de droits à la retraite, les frais de reconversion, il n'existe pas de méthode déterminée pour indemniser la pénibilité, la désocialisation liée à une privation de capacité de travail définitive. Ce sera une évaluation et une négociation au cas par cas.

Qu'en est-il de l'indemnisation pour un salarié ?

C'est a priori le cas le plus simple. Pour les pertes de gains avant consolidation, il faut calculer le salaire net de référence avant l'accident, le revaloriser d'année en année, déduire les indemnités maladie, prévoyance, rentes invalidité, incapacité et on obtient la perte de gains.

Pour évaluer les pertes de gains après consolidation, les salaires après consolidation seront comparés au revenu de référence.

Si le salarié a fait l'objet d'un licenciement pour inaptitude à son poste en raison des séquelles de l'accident, les indemnités chômage ne seront pas déduites.

Pour un salarié qui était en recherche d'emploi au moment de l'accident, son indemnisation sera évaluée en fonction d'un taux de perte de chance d'avoir pu retrouver un emploi rapidement en raison de l'accident. Ce taux de perte de chance sera apprécié en fonction du parcours de la victime : sa formation, son expérience professionnelle, son domaine d'activité et le secteur professionnel concerné.

Est-ce différent si la victime est un indépendant ?

Les principes restent les mêmes : évaluer les rémunérations avant/après l'accident et pour l'avenir, une progression raisonnable de l'activité libérale.

Pour une personne qui vient de commencer une activité libérale aux revenus modestes, mais des espérances prometteuses, il faudra démontrer que celles-ci étaient sérieuses. Les statistiques des niveaux de rémunérations par profession peuvent être utilisées ainsi que l'analyse d'un expert-comptable.

L'indemnisation pourra donc être calculée sur la perte de chance d'obtenir ces revenus.

Dans tous les cas, il sera fait déduction des rémunérations effectivement perçues après l'accident ainsi que des prestations des tiers payeurs.

Comment ne pas se tromper au moment du choix de la forme d'indemnisation (rente ou capital ?)

L'indemnisation des pertes de gains professionnels sous forme de rente garantit à la victime la permanence de ces versements et donc une certaine sécurité. En revanche, les taux de revalorisation des rentes peuvent donc conduire à une érosion du montant de la rente au fil du temps.

S'il s'agit d'un accident de la circulation ou d'un aléa thérapeutique, l'indice de revalorisation est imposé par la Loi. Pour les autres cas, il est donc possible de négocier avec l'assureur un autre indice, par exemple le SMIC.

Il peut être préférable d'opter pour une indemnisation en capital. Cela permet à la victime d'obtenir un montant qu'elle pourra investir ou placer.

Ce capital correspond à la perte annuelle de gains réévaluée à la date de la liquidation, multipliée par le prix d'un euro de rente en fonction de l'âge de la victime, de la durée du versement de la rente (exemple : viager, jusqu'à 65 ans...).

Ce prix de l'euro de rente est déterminé par des tables de capitalisation, prenant en compte différents critères tels que l'espérance de vie, le taux d'inflation, le sexe...

Il existe plusieurs barèmes différents, plus ou moins favorables aux victimes et le choix de l'un d'entre eux fait l'objet de négociations.

Dans le cas où une indemnisation est soumise à l'appréciation d'un Juge, c'est celui-ci qui déterminera si l'indemnisation sera versée en rente ou en capital et choisira le barème de capitalisation.

Compte tenu de leur incidence économique, ces indemnisations font l'objet d'âpres négociations qui nécessitent l'assistance d'un avocat spécialisé.

La consultation du présent article est notamment soumise aux CGU de Scribeo

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.