Roubaix, territoire zéro déchet : quel bilan ?

Avec des statistiques peu enviables s'agissant du chômage, de la pauvreté, ou de la délinquance... la ville ne brille pas dans les classements. Et pourtant, sans en avoir les compétences a priori, elle s'est lancée en 2014 dans une initiative quasiment unique en France : le zéro déchet.
À Roubaix, le maire ex-LR Guillaume Delbar a initié un projet quasiment unique en France.
À Roubaix, le maire ex-LR Guillaume Delbar a initié un projet quasiment unique en France. (Crédits : DR)

C'est une initiative quasiment unique en France : Roubaix a mis en place depuis 2014 une stratégie zéro déchet... même si la municipalité ne possède pas cette compétence. L'objectif était d'abord de répondre au besoin criant de propreté dans les rues de la ville, en agissant à la source. Petit à petit, le message s'est transformé en marketing territorial, attirant tout un écosystème économique.

Tout d'abord, un triste constat: Avec 30% de chômage (contre 8,8% à l'échelle nationale), 46% de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté (avec moins de 960 euros par mois),  un taux de délinquance qui a amené cette année à mettre en place une police de sécurité du quotidien dans le quartier de l'Alma sans oublier les dépôts clandestins quotidiens qui entraînent 1.000 PV chaque année, la ville ne brille pas dans les classements. C'est pourquoi la nouvelle majorité à Roubaix de Guillaume Delbar (ex-LR) a tenu à mettre la sécurité, la propreté et l'emploi au coeur de ses préoccupations. Elle poursuit et amplifie ainsi l'immense chantier de la propreté déjà exploré par les précédentes mandatures. Avec un projet de taille : le  Zéro Déchet.

En un an, le poids des déchets résiduels réduits par quatre

Tout est parti d'un appel à projets lancé en 2014 par le ministère de l'Écologie. Depuis, 500 familles sont inscrites chaque année dans la démarche, avec un accompagnement et un suivi régulier pour éviter de produire trop de déchets. Résultat : après un an, le poids des déchets résiduels des familles concernées est quatre fois inférieur à la moyenne roubaisienne. « Et nous avons observé une hausse de pouvoir d'achat des ménages, grâce aux économies réalisées, de l'ordre de 1000 euros par an », se réjouit le maire.

« Sur ces 500 familles, 100 d'entre elles sont renouvelées chaque année, ce qui représente 1.500 personnes engagées dans le zéro déchet soit 1,5 % de la population : nous misons sur le fait que l'action d'une personne en touche sept autres », commente Alexandre Garcin, adjoint au maire chargé du développement durable, dont le nouvel objectif est d'accompagner désormais 1 000 familles par an.

L'expérience étendue aux cantines scolaires

Pour lui, le développement de l'opération repose sur une diffusion en trois temps : « Nous aurons toujours des "early adopters" qui vont se lancer avant les autres, puis des "suiveurs", et enfin ceux qui n'auront pas forcément d'avis ou ceux qui seront réticents : ce qui compte au fond, c'est la prise de conscience et la dynamique positive pour la ville de Roubaix. »

L'expérimentation a été étendue aux cantines scolaires, concernant près de 50 écoles, impactant « 10.000 enfants et donc 20.000 parents », poursuit l'adjoint. À la cantine, on lutte contre le gaspillage : le personnel a reçu une formation spécifique. Terminés les emballages plastique pour les entrées, les desserts ou les fromages. Les assiettes sont servies en fonction de l'appétit des enfants, ce qui leur permet de décider des quantités correspondant à leur faim. Les repas sont également adaptés aux envies des élèves par une diététicienne. Les parents choisissent le menu en amont. Le résultat est spectaculaire avec « seulement » 70 à 50 grammes de déchets par jour et par enfant en moyenne, contre 200 auparavant.

« Nous menons aussi une réflexion zéro déchets au sein des classes : on ne va pas exiger l'achat d'un nouveau cahier avant qu'un autre soit terminé, par exemple. Les enseignants ont mis en place des boîtes à goûter dans lesquels ils mettent chaque jour un fruit. Le mobilier est réparé plutôt que renouvelé. Les produits d'entretien sont écologiques. On instaure le tri des déchets dans la classe et la cour », détaille Alexandre Garcin, qui s'efforce d'impliquer toutes les parties prenantes.

Les commerçants se joignent au mouvement

L'attitude zéro déchet a également été prêchée auprès des commerçants, qui en ont fait un argument de vente. Une conseillère commerce a été missionnée par la mairie pour proposer des solutions clés en main. Pour être estampillé « Je suis un commerçant zéro déchet », il faut informer sa clientèle, ne pas distribuer de sacs, ni de couverts jetables, bien trier ses déchets et aider les clients à faire de même.

Quelque 45 commerçants ont déjà rejoint la démarche et l'objectif de la mairie est d'en comptabiliser 100 d'ici 2021.

Une source d'inspiration pour d'autres villes de France

La démarche a été source d'inspiration pour plusieurs villes de France, comme Miramas ou Libourne, mais aussi au Brésil et au Canada. Désormais, Roubaix ambitionne de boucler la boucle, en encourageant les projets d'économie circulaire. Alexandre Garcin annonce même une trentaine d'initiatives, essentiellement portées par des associations comme Le Cabas du sourire pour l'organisation du glanage en fin de marché, une ressourcerie ou le recyclage de matériaux de construction. Pour cela, la mairie va doubler son budget, qui était de 600.000 euros sur trois ans, partagés à parts égales entre une subvention de l'Ademe et les finances de la ville.

Reste qu'il est encore difficile de connaître la réduction sur le tonnage des déchets ramassés à l'échelle de ville... puisque la compétence appartient à la Métropole européenne de Lille. « Le zéro déchet a amélioré le pouvoir d'achat des ménages, a créé du lien social, est devenu un marqueur de notre ville, affirme le maire. La ville a dépensé 300.000 euros pour 400 familles en 2015. Ces dernières ont économisé chacune 1.000 euros par an : le voilà, le retour sur investissement ! »

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Commentaire 1
à écrit le 30/10/2019 à 15:15
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Quand l'UE va tomber aussi bas que Roubaix, et nos mégas riches travaillent vite à cela, il faudra bien aussi qu'elle se mette enfin à réfléchir et chercher des solutions... qui fonctionnent. Bravo à eux même s'il n'est pas étonnant que ce soient...

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